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Auteur Sujet: L'Assemblée nationale approuve la réforme de l'hospitalisation sous contrainte  (Lu 2901 fois)

JacquesL

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L'Assemblée nationale approuve la réforme de l'hospitalisation sous contrainte
http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/03/22/l-assemblee-nationale-approuve-la-reforme-de-l-hospitalisation-d-office_1497046_3224.html
http://www.lemonde.fr/imprimer/article/2011/03/22/1497046.html

Les députés, oui, mais les psychiatres sont beaucoup plus critiques.

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L'Assemblée nationale approuve la réforme de l'hospitalisation sous contrainte
LEMONDE.FR avec AFP | 22.03.11 | 18h06  •  Mis à jour le 22.03.11 | 18h29

L'Assemblée a voté, mardi 22 mars, en première lecture, le projet de loi réformant l'hospitalisation sous contrainte. Le texte, voté par 266 voix contre 147, autorise notamment les soins ambulatoires sous contrainte et non plus seulement l'hospitalisation. Il avait été initié fin 2008 par le président Nicolas Sarkozy après le meurtre à Grenoble d'un étudiant par un malade mental enfui de l'hôpital.

Le projet de loi concerne quelque 70 000 personnes qui, chaque année, sont hospitalisées soit à la demande d'un tiers (60 000 cas) ou d'office en cas d'atteinte "à la sûreté des personnes" ou "à l'ordre public" (10 000 cas). Cette dernière mesure permet au préfet de demander, sur la base d'un certificat médical, un internement en cas de trouble grave à l'ordre public ou de risque d'atteinte à la sûreté des personnes.

UNE LOI CONTROVERSÉE

La version présentée à l'Assemblée tenait compte d'une décision du Conseil constitutionnel, qui impose l'intervention du juge judiciaire au-delà de quinze jours. Le texte est cependant dénoncé par les syndicats de psychiatres comme "sécuritaire".

Le PS, par la voix de Serge Blisko, a dénoncé "un projet bancal", "imposé par le tout sécuritaire" et "basé sur la méfiance". "La psychiatrie est sinistrée" et, selon lui, ce texte opère "un retour en arrière". "1 000 postes de psychiatres ne sont pas pourvus dans les hôpitaux publics", a-t-il rappelé. Le Nouveau Centre a au contraire jugé la réforme "équilibrée" et André Flajolet (UMP) a fait valoir que le texte "renforce les droits des patients". Au cours du débat, la secrétaire d'Etat à la Santé Nora Berra a annoncé qu'un "plan santé mental" serait prêt "à l'automne".

LE CONTRÔLEUR DES PRISONS DÉNONCE DES DÉRIVES

Jean-Marie Delarue, le contrôleur général des lieux de privation de liberté, a dénoncé en fin de semaine dernière la multiplication des pratiques d'enfermement en psychiatrie. "Les incertitudes et les risques qui subsistent ne peuvent pas conduire à un accroissement préoccupant du nombre de personnes dont la maladie n'exige plus qu'elles soient privées de liberté ou isolées, sans justification médicale reconnue, pour des motifs d'atteinte à l'ordre public qui ne seraient ni avérés ni actuels", a-t-il écrit dans un avis destiné au Journal officiel. Selon lui, il est de moins en moins tenu compte des avis des psychiatres quand ceux-ci estiment que le patient, soigné, peut quitter l'hôpital. Les sorties d'essai qu'ils demandent aux préfets sont plus difficiles à obtenir et les sorties définitives plus aléatoires.

http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/03/04/le-projet-de-loi-sur-les-soins-psychiatriques-suscite-une-forte-opposition_1487129_3224.html#ens_id=1487390
http://www.lemonde.fr/imprimer/article/2011/03/04/1487129.html
Le projet de loi sur les soins psychiatriques suscite une forte opposition

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Le projet de loi sur les soins psychiatriques suscite une forte opposition
LEMONDE.FR | 04.03.11 | 21h33  •  Mis à jour le 04.03.11 | 22h07

La pétition a recueilli plus de dix-sept mille signatures, vendredi 4 mars. Parmi lesquelles, celles de personnalités comme l'ancien ambassadeur Stéphane Hessel, le sociologue Edgar Morin ou le magistrat Serge Portelli. Toutes dénoncent un projet de loi qui prévoit "un traitement sécuritaire des malades mentaux". A l'initiative de la pétition, le Collectif des trente-neuf contre la nuit sécuritaire, un groupe de professionnels et d'usagers de la psychiatrie.

Leur appel, relayé lundi par une tribune dans Libération, dénonce un projet de loi sur les soins psychiatriques. Adopté le 26 janvier en conseil des ministres, il doit être débattu en séance publique à partir du 15 mars à l'Assemblée nationale, date à laquelle le collectif prévoit de manifester devant le Palais-Bourbon.

Le projet de loi dénoncé par la pétition s'inscrit d'abord dans un contexte politique. Après un fait-divers largement médiatisé, le meurtre d'un étudiant à Grenoble par un malade mental en fuite en 2008, Nicolas Sarkozy réclame une réforme des soins psychiatriques. Une étape dans le discours du politique sur la santé mentale : c'est alors que le Collectif des trente-neuf se forme et s'indigne du "virage sécuritaire" d'un président qui "assimile la maladie mentale à une supposée dangerosité".

OBLIGATION DE SOINS

Complexe, le texte repose sur une mesure centrale : le passage de l'hospitalisation d'office aux "soins sans consentement sur décision du représentant d'Etat". S'il est aujourd'hui possible d'imposer l'hospitalisation à un malade, les soins à domicile deviendraient également contraignants. Cette obligation pourra être présentée, selon le projet de loi, après une observation en hôpital de trois jours, contre vingt-quatre heures aujourd'hui. En cas de non-suivi des soins, une nouvelle hospitalisation sera alors imposée.

"C'est de la garde à vue", estime Yves Gigou, un des porte-parole du Collectif des trente-neuf au sujet des soixante-douze heures d'observation. "C'est la stigmatisation de la maladie mentale pour faire peur au gens", explique l'infirmier à la retraite. Surtout, le collectif dénonce le principe de la contrainte, qui rompt, par définition, le consentement et la confiance, nécessaires à la thérapie.

Autres dérives possibles selon Yves Gigou : "retrouver des malades hospitalisés pour des périodes plus longues", avec l'obligation de retour à l'hôpital dans le cas de non-suivi des soins. Ou encore la sur-utilisation des médicaments pendant les traitements à l'hôpital. "Avec cette loi, on a aussi peur que les patients se cachent, ce qui augmenterait leur dangerosité", explique Yves Gigou.

INTERVENTION DU JUGE

Guy Lefrand, député UMP et rapporteur de la loi, rejette ces critiques et évoque au contraire "un renforcement du droit des patients". Le texte prévoit en effet l'intervention automatique d'un juge des libertés après quinze jours d'hospitalisation. Un changement introduit dans le texte à la demande du Conseil constitutionnel.

Guy Lefrand souligne également la troisième mesure fondamentale du projet de loi : le "risque grave d'atteinte à l'intégralité du malade". Il s'agit de la possibilité d'hospitaliser, sur décision du corps médical, un malade qui ne représente pas un trouble pour l'ordre public. Aujourd'hui, l'accord d'un tiers est nécessaire, ce qui représente un frein à la prise en charge, selon Guy Lefrand, lorsque l'aidant se sent menacé ou quand le malade est à la rue, sans liens familiaux. En France, près de soixante-dix mille patients ont été hospitalisés sans leur consentement en 2008, ce qui représente un quart des hospitalisations psychiatriques.

"MIEUX DEHORS QUE DEDANS"

Ceux qui travaillent auprès des malades relèvent la complexité à légiférer sur l'obligation de soins. Carmen Delavaloire, à la tête de sept groupes d'entraide mutuelle, des centres qui offrent un espace d'activités et de réinsertion aux anciens patients, condamne un projet de loi qui "porte atteinte à la liberté" avant de reconnaître le bien-fondé de l'obligation de soins dans certains cas. "On remarque que lorsque l'hospitalisation des soins est forcée, il y a plus d'échecs (...), mais quand une personne est dans une situation de crise, l'obligation de soins peut être indispensable et nécessaire pour protéger la personne, l'entourage et la société", admet l'éducatrice spécialisée.

Pour Guy Lefrand, cette loi doit avant tout faciliter la sortie du patient de l'hôpital : "L'obligation de soins existe déjà, sauf qu'elle a lieu à l'intérieur de l'hôpital. Or, le patient sera désormais en liberté." Un changement accueilli avec soulagement par les familles, souvent démunies face aux malades après leur retour dans la cité.

"On trouve que les malades sont mieux dehors que dedans", estime Jean Canneva, président de l'Union nationale de familles et amis de malades psychiques (Unafam). En faveur de la loi "en principe", il s'interroge cependant sur la possibilité d'appliquer les nouvelles mesures.

"UN GRAND PLAN POUR LA SANTÉ MENTALE"

Interventions de juges et d'équipes soignantes alors que magistrats et personnels hospitaliers dénoncent le manque de moyens de leurs institutions, la mise en œuvre de la loi fait débat. "Evidemment, l'intervention du juge n'est pas simple à mettre en place", admet Guy Lefrand. Des solutions sont donc envisagées : la visioconférence ou encore le déplacement du juge lorsqu'il doit statuer sur de nombreux cas.

Guy Lefrand comme Yves Gigou évoquent la nécessité "d'un grand plan de la santé mentale". Alors que le nombre de lits en hôpital psychiatrique a été réduit de moitié en vingt ans, ce plan devrait s'occuper du problème du manque de moyens des services psychiatriques et du déficit de formation des infirmiers. Un plan dont l'urgence évoquée par les professionnels se mesure à ce chiffre de l'Organisation mondiale de la santé : la dépression sera la première cause de handicap d'ici à 2030.
Flora Genoux


La loi sur la psychiatrie est l'indice d'un Etat qui préfère punir que guérir

http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/03/21/la-loi-sur-la-psychiatrie-est-l-indice-d-un-etat-qui-prefere-punir-que-guerir_1496307_3232.html#ens_id=1487390
http://www.lemonde.fr/imprimer/article/2011/03/21/1496307.html
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La loi sur la psychiatrie est l'indice d'un Etat qui préfère punir que guérir
LEMONDE | 21.03.11 | 13h24  •  Mis à jour le 22.03.11 | 09h24

Le projet de loi relatif aux "droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques" provoque à juste titre la colère et l'indignation des associations professionnelles. On dénonce la création d'un casier judiciaire psychiatrique ou d'une garde à vue psychiatrique. On pointe la dimension exclusivement sécuritaire du projet de loi, dont le vocabulaire et la logique relèvent plus du ministère de l'intérieur que de celui de la santé. Ce n'est pas tout à fait vrai. C'est pire : il est sanitaire pour les entrées et sécuritaire pour les sorties, ce qui rendra un peu plus infernale la situation sur le terrain, en engorgeant les unités d'hospitalisation temps plein et en entravant la réalisation des soins urgents, notamment pour les malades susceptibles de commettre un acte violent.

On critique l'absence de moyens qui rend ce projet irréalisable et la mauvaise foi de ceux qui feignent de l'ignorer. Tout cela est exact mais ces objections sont singulièrement naïves : comme si le projet du législateur était d'adopter une loi effective ! Il y a belle lurette que les lois ne sont plus faites pour être appliquées ou pour améliorer la situation de ceux qui auront à en subir les effets, mais pour afficher la force de l'Etat-gendarme.

En un mot, pour comprendre le contexte de ce projet de loi, il faut surmonter l'indignation, prendre la mesure d'un certain nombre de bouleversements et de changements de paradigme. On se donne alors une chance de saisir ce qu'il peut y avoir de commun entre des phénomènes apparemment aussi divers que la souffrance au travail, avec son lot de suicides, la plainte diffuse de corps professionnels comme les policiers, les enseignants, les chercheurs, les magistrats, les médecins hospitaliers... ou la recherche systématique de boucs émissaires.

Il est d'usage d'opposer l'Etat-providence à l'Etat-gendarme et de reléguer le premier à un passé révolu. Mais l'on n'a pas suffisamment pris la mesure des effets psychiques qui ont accompagné la façon dont s'est opérée cette mutation dans notre pays : c'est une chose de ne plus se sentir protégé par une instance bienveillante ; c'en est une autre de vivre dans toute leur cruauté les attaques de ce qui exerçait autrefois une fonction tutélaire. C'est ce retournement malveillant qui est au coeur d'un grand nombre de souffrances diffuses : le sujet ne se sent plus seulement "lâché", mais se sent attaqué violemment par l'Etat, qui se défausse sur lui. Pourquoi ?

C'est que les politiques doivent résoudre une équation singulièrement complexe : concilier le maintien, voire l'accroissement des attentes, la pression des lobbies associatifs et la diminution des moyens, sans déclencher la colère populaire avec ses conséquences électorales.

Force est de constater qu'il y a également des solutions perverses. Elles ne sont pas réductibles au mensonge. Elles reposent sur les mêmes mécanismes que ceux que l'on décrit dans la clinique des perversions et de la perversité : le déni ; le clivage ; la projection (on chasse le lampiste et on choisit le bouc émissaire, généralement parmi les plus vulnérables) ; le défi (on fustige tout argument critique) ; l'inversion des valeurs (les plus démunis deviennent les plus dangereux) ; la fuite en avant (tel un vulgaire escroc empêtré dans la course folle de sa cavalerie, l'Etat vole de loi inappliquée en loi inapplicable)....

En bout de course, ce sont les acteurs de terrain qui se voient désignés comme étant à l'origine du mal et qui en portent le poids. Qui dira la douleur de ceux qui ont choisi de donner un sens collectif à leur engagement et qui se voient, au coup par coup, au petit malheur la malchance, designés à la foule comme fauteurs de troubles à l'ordre public ; de ceux qui se débattent pour sauver ce qui peut l'être ? Policiers, magistrats, fonctionnaires de justice, enseignants, chercheurs, médecins hospitaliers... ils se reconnaîtront.

Mais là encore, pour bien saisir ces changements, il faut prendre la mesure de deux bouleversements de nos représentations. C'est sur eux que s'appuie la solution politique perverse : aujourd'hui, la question n'est plus "Que faire ?" mais "A qui imputer ?". Il ne s'agit plus tant de construire ensemble que de savoir qui est responsable des dysfonctionnements.

La bureaucratie managériale en est l'agent. Elle s'infiltre partout et nous commande ce qui doit être et comment faire plus avec moins. On réglemente. On établit des procédures. On impute. On communique. Mais il n'est pas certain que l'on construise ensemble l'avenir du pays.

Le second bouleversement est la désuétude de l'éthique de la responsabilité, qu'il ne faut surtout pas confondre avec la recherche permanente d'un responsable. Cette dernière relève d'une logique d'adjudant en quête de bidasse chargé de corvée. Comme Michel Foucault l'avait clairement pressenti, on a glissé du paradigme du sujet responsable (ou irresponsable s'il est malade) à celui de l'individu dangereux porteur de risques. Malade ou non, il est la nouvelle figure de la peur.

Le vrai responsable, celui à qui il convient d'imputer l'origine du crime, ce n'est donc plus celui qui l'a commis, mais le juge qui l'a libéré, le psychiatre qui a décidé de sa sortie de l'hôpital, ou l'agent de probation qui ne l'a pas suffisamment surveillé... Il suffit de réfléchir quelques secondes pour mesurer combien ce nouveau regard qui déresponsabilise l'auteur pour surresponsabiliser celui qui l'encadre est lourd de conséquences, puisque l'homme criminel n'est plus sujet de ses actes, transférant sur les acteurs du champ social l'opprobre de son geste.

On reconnaît la rhétorique habituelle de notre président : il n'y a pas de fatalisme ; il y a bien un responsable ; il faudra payer ; c'est la règle... Après le musulman, le Rom, c'est le tour du fou dangereux. C'est à lui d'incarner cette peur dont l'Etat sécuritaire a besoin pour s'auto-affirmer. Tous les pervers le savent : c'est aux plus faibles qu'il convient de s'attaquer si l'on veut être certain du résultat.

Dès lors, on comprendra que tous les arguments sensés, tous les développements sur notre histoire prestigieuse, nos valeurs de civilisation, soient de peu de poids. Au contraire, ils renforcent la détermination de ceux auxquels ces critiques s'adressent. Cette loi en discussion, si elle est votée, ne sera que le dernier avatar, affligeant, misérable, d'un système original qui avait fait ses preuves pendant près de deux siècles.

Elle sera appelée à être abrogée, pour ouvrir la voie à une judiciarisation des hospitalisations, comme dans tous les pays de développement comparable au nôtre. Les historiens se demanderont à quoi avait bien pu servir cet intermède législatif imposé contre le consentement de la profession. A des facteurs exclusivement conjoncturels. A pas grand-chose au regard des enjeux fondamentaux que sont, pour toute société, la façon dont elle traite les plus démunis de ses citoyens et l'équilibre fragile et délicat entre la nécessité de soins et le respect des libertés individuelles. C'est ce "pas grand-chose" qui semble caractériser la période que nous traversons.

La "philosophie" qui sous-tend l'ensemble de ce projet de loi est nauséabonde. Il faut le refuser.

 

 
Daniel Zagury, psychiatre, médecin-chef au Centre psychiatrique du Bois-de-Bondy (Seine-Saint-Denis), expert auprès des tribunaux
Article paru dans l'édition du 22.03.11

JacquesL

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"La loi sur la psychiatrie est absurde, incohérente et inapplicable !"
« Réponse #1 le: 29 mars 2011, 10:26:49 am »
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/03/28/la-loi-sur-la-psychiatrie-est-absurde-incoherente-et-inapplicable_1498654_3232.html
http://www.lemonde.fr/imprimer/article/2011/03/28/1498654.html

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"La loi sur la psychiatrie est absurde, incohérente et inapplicable !"
LEMONDE.FR | 28.03.11 | 09h48  •  Mis à jour le 28.03.11 | 10h19

Les députés ont adopté en première lecture dans la nuit du 16 mars, le projet de loi "relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge". Le vote solennel du projet a eu lieu mardi 22 mars, avant d'être envoyé au Sénat pour examen. Mais, il n'y aura pas de seconde lecture.

Le gouvernement ayant choisi la procédure accélérée, le texte, même éventuellement modifié par les sénateurs, pourra être adopté selon la première lecture de l'Assemblée nationale ! Pourtant ce projet de loi provoque un basculement radical de la pratique psychiatrie, une transformation démente et inquiétante de la psychiatrie !

Les équipes soignantes vont être transformées par cette loi en une "police sanitaire psychiatrique" dont le rôle va être réduit à "surveiller, contrôler, injecter" !

Cette loi a été voulue par le président de la République réagissant dans l'émotion et la précipitation au meurtre d'un étudiant par un malade. Cette loi devrait concerner les personnes actuellement sous contrainte, c'est à dire 70 000 personnes sur les 300 000 hospitalisées. Mais elle est organisée à partir des situations en hospitalisation d'office, c'est à dire 10 000 personnes ! Elle a pour socle, le présupposé totalement erroné sur le plan scientifique, énoncé par le président en décembre 2008 : "Tous les malades mentaux sont potentiellement dangereux, potentiellement criminels !"

Ainsi l'ensemble des personnes soignées en psychiatrie, celles qui choisissent librement de se soigner, c'est à dire 80 % des malades hospitalisés, mais aussi les trois millions de personnes ayant consulté et traités pour un trouble psychique vont se retrouver confrontés "par contamination" aux mêmes a priori, aux mêmes préjugés, aux mêmes risques, et tomber potentiellement dans les "soins sans consentement".

Ce message terrible, ravageant, faisant appel aux peurs ancestrales de la folie, désigne à la vindicte populaire ces personnes, amplifie la peur de l'autre, renforce la stigmatisation. La loi vient l'instituer de façon insupportable, indigne !

Les 23 000 signataires de l'Appel lancé par le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire : "Réforme de la psychiatrie : une déraison d'Etat", la totalité des syndicats de psychiatres – fait inédit – le syndicat national des psychologues, les syndicats de personnels soignants, des associations de psychanalystes, des associations de patients, des associations de familles, le Syndicat de la magistrature, plusieurs centaines de manifestants mardi 15 mars devant l'assemblée, rien n'y a fait !

La psychiatrie est pourtant dans un état catastrophique depuis plus de dix ans. Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté vient de rendre public un rapport accablant sur la situation dans les hôpitaux psychiatriques. Sa conclusion, la psychiatrie est un monde caché, "et dans ce monde-là, ce n'est pas tant la loi, quelle qu'elle soit qui est en cause, mais la réalité des pratiques" !

DÉRIVES

Depuis deux ans qu'il s'est constitué, le Collectif des 39 dénonce la dérive des pratiques, des situations de maltraitance des malades, la banalisation des contentions, l'abandon des familles à leur désarroi. Les Etats généraux de la psychiatrie en juin 2003 avaient déjà réclamé vingt-deux mesures d'urgence pour tenter de lutter contre le péril menaçant l'ensemble de la psychiatrie !

Cette situation n'est en rien dû à la mauvaise volonté des soignants, à une indifférence au sort des malades et des familles. Elle est le résultat de plusieurs éléments : conception de la maladie mentale qui s'est imposée avec le scientisme dominant des dernières années, formation indigente des psychiatres réduite aux seuls traitements médicamenteux, absence quasi-totale d'une formation digne de ce nom pour les infirmiers, laminage des esprits par l'idéologie de l'hôpital-entreprise, de la gestion bureaucratique parachevée par la récente loi Hôpital, patients, santé, territoires, à la pénurie organisée, enfin absence de budget spécifique pour la psychiatrie.

Aux arguments étayés de toute la profession, tous statuts confondus, dénonçant une loi sécuritaire mais revendiquant l'urgence d'une loi sanitaire, aux appels au secours d'associations de patients, aux rejets par de nombreuses associations régionales des de familles de malades, le rapporteur du projet de loi n'a opposé qu'arrogance, falsification, mystification, ignorance. Falsification, lorsqu'il déclare que la loi va permettre de sauver les quatre mille personnes qui se suicident chaque année ! Mystification, quand il proclame que les 30 000 à 60 000 personnes sans domicile fixe qui souffrent de troubles mentaux, abandonnées par leur famille,vont pouvoir être prises en charge ! Ignorance de la pratique psychiatrique, quand il déclare que les patients qui dénient leur pathologie vont être enfin traitées grâce à ce dispositif !

De plus, avec ce projet de loi, force reste au préfet. La disqualification des professionnels est totale, la suspicion à leur égard comme à l'égard des magistrats est entérinée par le texte.

Pire, dans leur aveuglement politique, dans leur méconnaissance de la clinique psychiatrique la plus élémentaire, les députés de la majorité n'ont pas pris la mesure du plus grave : cette loi, si elle est adoptée, va aboutir à l'exacte inverse de ce à quoi elle prétend répondre : la sécurité et la prévention des passages à l'acte dangereux.

En effet, les personnes les plus perturbées, les plus en souffrance, sont aux prises avec une méfiance extrême, voire des sentiments de persécution, des sentiments d'être surveillés, épiés. Ces personnes lorsqu'elles sauront qu'elles seront dénoncées par leur psychiatre, leurs soignants au directeur de l'hôpital et au préfet, en cas de refus ou d'opposition aux soins et risquant un retour forcée à l'hôpital, vont tout faire pour échapper, pour se sauver. Et c'est dans un tel contexte, que des individus ayant le sentiment d'être cernés, pourchassés, forcés, risquent de basculer dans des passages à l'acte les plus graves…

La psychiatrie, dans une perspective thérapeutique, ne peut travailler qu'en favorisant la confiance, l'instauration d'une relation rassurante, le tissage d'un lien avec une personne malade. C'est dans ce cadre, et uniquement dans ce cadre, que nous pouvons imposer une contrainte parfois nécessaire, que la psychiatrie peut prétendre être thérapeutique.

Mesdames, messieurs les parlementaires, prenez conscience de l'immense responsabilité que vous prenez, de l'absurdité de ce dispositif législatif, de cette monstruosité qui est en train de se créer !

Paul Machto, psychiatre des hôpitaux, Marie Cathelineau, psychologue, Hervé Bokobza, psychiatre, pour le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire

Rappel :  "Harkis" et la criminalité institutionnelle (psychiatrique notamment), 11 octobre 2006.
France 2 passait hier soir "Harkis".

L'action se situe déjà après dix ans de camp de harkis.
Dix ans ? Donc en 1972, sous Pompidou. Pompidou venait de se ridiculiser avec son référendum sans enjeu, censé approuver la construction de l'Europe - Et m'aimez-vous ?

1972, j'étais jeune marié, et nous vivions dans notre premier HLM.
1972, j'adhérais au nouveau Parti Socialiste.
Et eux étaient depuis dix ans déjà cachés dans des camps en pleine forêt.
Ce que le film m'a appris, c'est le détail de la délinquance et de la criminalité institutionnelles qui étaient pratiquées contre eux, par les autorités : le chef de camp, et le ministère de tutelle.

Ce qui personnellement m'interroge et me remue le plus, c'est la criminalité psychiatrique institutionnelle, digne de l'URSS de Brejnev : l'oncle Saïd a écrit au ministre pour dénoncer le scandale de ces camps-prisons. Par représaille, et pour terroriser les autres, on le capture à six gendarmes et trois infirmiers, on l'incarcère dans une section spéciale de l'HP, où on le "traite". Là le film est sybillin : l'a-t-on lobotomisé ? Comment lui a-t-on bousillé le cerveau ? Il est un jour ramené au camp à l'état de légume.

Les électrochocs à répétition suffisent-ils pour obtenir une telle destruction ? Je pose la question aux spécialistes.

Quel était en 1972 l'état de la criminalité psychiatrique institutionnelle en France ? Y avait-il encore des bouchers sadiques pratiquant les lobotomies ? Clandestinement ou ouvertement ?

1972, le film de Ken Loach "Family life" venait de sortir. Nous allions le voir dans la salle parisienne où il était projeté, et ma jeune épouse en sortait bouleversée : "C'est exactement ce que j'ai connu dans ma propre famille" (cette volonté chez la mère de détruire la personnalité de sa fille). Dans le film de Loach, c'est à coups d'électrochocs à répétition, que l'assassin en blouse blanche en fait une catatonique, qu'il peut alors exhiber en amphi.

J'en oublie les autres aspects délinquants de la direction du camp, le commandement par le mensonge permanent, le mépris et la terreur... Après tout, dans chacune de ses proclamations à ses soldats, Napoléon lui aussi mentait constamment, faisant des promesses qu'il comptait bien ne jamais tenir. Quelle armée ignoble nous avions sécrété là, l'armée des guerres coloniales !

Pour en savoir plus :
les harkis, qui étaient-ils ?
http://www.ldh-toulon.net/spip.php?article151
Harkis : un crime d’État
http://www.ldh-toulon.net/spip.php?article46

Coalition harkis :
http://www.coalition-harkis.com/content/view/86/

http://www.harkisetverite.info/


Suivis : fr.bio.medecine et
http://deonto-famille.org/citoyens/debattre/index.php?topic=43.0
http://deonto-famille.info/index.php?topic=42.0

« Modifié: 29 mars 2011, 10:32:17 am par Jacques »

JacquesL

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L'hospitalisation sous contrainte réformée, en application au CHP :
« Réponse #2 le: 20 août 2011, 12:35:28 am »
L'hospitalisation sous contrainte réformée, en application au CHP :

http://www.larepubliquedespyrenees.fr/2011/08/19/des-audiences-a-l-hopital-psychiatrique,207341.php
L'info est assez riche, et mérite qu'on la détaille.