Bienvenue, Invité. Merci de vous connecter ou de vous inscrire.
Avez-vous perdu votre e-mail d'activation ?

28 mars 2024, 07:04:18 pm

Login with username, password and session length

Shoutbox

Membres
Stats
  • Total des messages: 5084
  • Total des sujets: 2368
  • En ligne aujourd'hui: 15
  • Record de connexion total: 138
  • (14 novembre 2018, 09:31:35 pm)
Membres en ligne
Membres: 0
Invités: 6
Total: 6

Auteur Sujet: Il n'y a progrès scientifique que là où il y a respect des minoritaires.  (Lu 1896 fois)

JacquesL

  • Administrateur
  • Membre Héroïque
  • *****
  • Messages: 4 595
Pré-requis : avoir une pratique de "faire" la science (avoir trouvé quelque chose là où il n'y avait rien ou juste des légendes infondées), avoir une pratique de l'histoire des sciences et techniques.
Souhaitable mais pas exigé : avoir une pratique du management d'équipes interprofessionnelles.


Antoine-Laurent de Lavoisier était incontestablement minoritaire chez les chimistes de son temps, quand il a rejeté le concept de phlogistique à pesanteur négative. Lui fréquentait des astronomes, chez qui la pesanteur négative, hé bien négatif, ça ne passait pas. Etre minoritaire au pays des jaloux, et ce qui est pis, être trouveur au pays des jaloux, implique une prise de risques, souvent énorme. Et autant il y a eu record de vitesse pour condamner et guillotiner Lavoisier, autant il y a eu concours de lenteur dans la communauté scientifique de l'époque, pour vaguement tenter de sauver la tête d'un des plus grands savant de l'époque.
C'est comme cela, les lois de la concurrence libre et sauvage : tous les moyens sont bons pour se débarrasser d'un concurrent trop doué et gênant. Le tout est de ne pas se faire pincer publiquement.


http://en.wikipedia.org/wiki/Ignaz_Semmelweis

Semmelweis Ignác Fülöp et son collègue étaient des minoritaires à l'hôpital de Wien, quand ils prouvèrent que les mains des médecins transportaient un mystérieux "Stoff" (des microbes) depuis les cadavres qu'ils disséquaient, vers les parturientes qu'ils tripotaient, infectaient et tuaient par septicémie. Le "Stoff" accusé restait mystérieux en 1847 : les microbes qui avaient tué tant de parturientes et Jacob Kolletschka demeuraient encore indiscernables sous le microscope dont Semmelweis et ses collègues internes disposaient. 
Ah évidemment, c'était embêtant pour le professeur Johann Klein d'avouer qu'il avait tué tant de femmes par négligence, et puis ça aurait bouleversé les méthodes de dominance entre carabins, de ne plus pouvoir exhiber en permanence ses mains ensanglantées et ses revers de jaquette pleins de pus, d'être obligé de se laver les mains cinq minutes dans de l'hypochlorite de calcium...

Qu'à cela ne tienne ! On accuse Semmelweis d'avoir participé à la tentative de révolution de 1848, on le jette au chômage, et hop ! Herr Johann Klein est débarrassé du progrès scientifique si gênant : l'asepsie !

C'est comme cela, les lois de la concurrence libre et sauvage : tous les moyens sont bons pour se débarrasser d'un concurrent trop rigoureux et gênant. Le tout est de ne pas se faire pincer publiquement. Etre minoritaire au pays des jaloux, et ce qui est pis, être trouveur au pays des jaloux, implique une prise de risques, n'est-ce pas ?

Dans toute coopération interprofessionnelle, telle ou telle sorte de compétences sont minoritaires à elles seules. Faut-il les écrabouiller, pour affirmer la suprématie d'une clique (ou du chef et ses courtisans) sur le restant du monde ? Il est prudent d'organiser préventivement le respect des minoritaires, et le code des devoirs réciproques, et des devoirs de l'institution envers plusieurs cercles de "clients" et de publics. Le développement des sciences comme le développement des produits et des services industriels, ou des services publics, cela se manage, et des règles de l'art existent.

L'histoire des sciences et des techniques démontre que très souvent la découverte ou l'invention sont le fait d'individus qui mariaient deux cultures dans la même tête, qui avaient des étonnements, des épreuves de réalité et des techniques que n'avaient pas leurs voisins monoculturels. Ces individus biculturels voire polyculturels sont inévitablement très minoritaires.

Et on peut exhiber encore d'autres raisons pour proclamer avec la consultante Florence Vidal : "Respectez vos minoritaires ! Vous ne savez pas d'où proviendront les idées qui sauveront et redéploieront votre entreprise. Rien ne garantit que cela viendra de ceux que vous chérissez et favorisez actuellement".

Cela implique-t-il que par un soudain renversement, c'est au tour du minoritaire d'être dispensé de tous devoirs et de toute discipline ?
Chacun peut citer des cas de tels minoritaires insupportables et pathologiques, s'estimant au dessus de toutes les lois.

A suivre.


« Modifié: 09 septembre 2012, 10:16:03 am par JacquesL »

JacquesL

  • Administrateur
  • Membre Héroïque
  • *****
  • Messages: 4 595
Harceler les minoritaires permet souvent d'échapper au progrès scientifique...
« Réponse #1 le: 09 septembre 2012, 02:03:13 pm »
Il est intéressant de développer le contre-pied : Harceler les minoritaires permet souvent d'échapper au progrès scientifique...

Pré-requis : être nul en pratique de la science (n'avoir rien trouvé ni découvert), n'avoir aucune pratique de l'histoire des sciences et techniques.
Et bien sûr : zéro pratique du management d'équipes interprofessionnelles.


Antoine-Laurent de Lavoisier était incontestablement minoritaire chez les chimistes de son temps, quand il a rejeté le concept de phlogistique à pesanteur négative. Lui fréquentait des astronomes, chez qui la pesanteur négative, hé bien négatif, ça ne passait pas. Etre minoritaire au pays des jaloux, et ce qui est pis, être trouveur au pays des jaloux, implique une prise de risques, souvent énorme. Et autant il y a eu record de vitesse pour condamner et guillotiner Lavoisier, autant il y a eu concours de lenteur dans la communauté scientifique de l'époque, pour vaguement tenter de sauver la tête d'un des plus grands savant de l'époque.
C'est comme cela, les lois de la concurrence libre et sauvage : tous les moyens sont bons pour se débarrasser d'un concurrent trop doué et gênant. Le tout est de ne pas se faire pincer publiquement.

Mais cette exécution précipitée n'a malheureusement pas retardé les progrès de la chimie : la France dans les guerres de la révolution puis du Directoire puis de Napoléon avait un urgent besoin de chimie, et pour la guerre, et pour faire face au blocus des côtes par les anglais. Quel dommage pour le phlogistique !


http://en.wikipedia.org/wiki/Ignaz_Semmelweis

Semmelweis Ignác Fülöp et son collègue étaient des minoritaires à l'hôpital de Wien, quand ils prouvèrent que les mains des médecins transportaient un mystérieux "Stoff" (des microbes) depuis les cadavres qu'ils disséquaient, vers les parturientes qu'ils tripotaient, infectaient et tuaient par septicémie. Le "Stoff" accusé restait mystérieux en 1847 : les microbes qui avaient tué tant de parturientes et Jacob Kolletschka demeuraient encore indiscernables sous le microscope dont Semmelweis et ses collègues internes disposaient. 
Ah évidemment, c'était embêtant pour le professeur Johann Klein d'avouer qu'il avait tué tant de femmes par négligence, et puis ça aurait bouleversé les méthodes de dominance entre carabins, de ne plus pouvoir exhiber en permanence ses mains ensanglantées et ses revers de jaquette pleins de pus, d'être obligé de se laver les mains cinq minutes dans de l'hypochlorite de calcium...

Qu'à cela ne tienne ! On accuse Semmelweis d'avoir participé à la tentative de révolution de 1848, on le jette au chômage, et hop ! Herr Johann Klein est débarrassé du progrès scientifique si gênant : l'asepsie !

C'est comme cela, les lois de la concurrence libre et sauvage : tous les moyens sont bons pour se débarrasser d'un concurrent trop rigoureux et gênant. Le tout est de ne pas se faire pincer publiquement. Etre minoritaire au pays des jaloux, et ce qui est pis, être trouveur au pays des jaloux, implique une prise de risques, n'est-ce pas ?

Là l'éradication de Semmelweis a permis de retarder d'un demi-siècle la prise en compte par les médecins et chirurgiens des contraintes de l'asepsie. Cette victoire totale ne fut contestée que par Pasteur et les pasteuriens.

Dans toute coopération interprofessionnelle, telle ou telle sorte de compétences sont minoritaires à elles seules. Il faut les écrabouiller pour affirmer la suprématie de la clique, du chef et ses courtisans sur le restant du monde. Il est indispensable d'organiser préventivement le harcèlement puis la suppression des minoritaires.

L'histoire des sciences et des techniques démontre que très souvent la découverte ou l'invention sont le fait d'individus qui mariaient deux cultures dans la même tête, qui avaient des étonnements, des épreuves de réalité et des techniques que n'avaient pas leurs voisins monoculturels. Ces individus biculturels voire polyculturels sont inévitablement très minoritaires. Ce qui est encore pis, c'est qu'ils sont souvent fort avisés et intelligents, il faut donc redoubler de violence et de ruse pour les abattre.

Mais si l'éradication de l'innovateur capable de réformer l'institution a échoué ? Que faire alors ?
Il reste encore trois tactiques, à pratiquer successivement :
Contrer l'information en prétendant « C'est nouveau, donc ce n'est pas vrai ! ».
Après échec de la tactique n° 2, passer à la tactique n° 3 :
Opposer « Bon, c'est vrai, mais ça n'est pas nouveau, on le savait déjà ! ».
Après échec de la tactique n° 3, passer à la tactique n° 4 :
Opposer « Bon, c'est vrai et c'est nouveau, mais c'est pas lui qui l'a découvert ! ».

A Jean Dausset, on les a toutes faites, les tactiques n° 2, 3 et 4.

Attention ! Ne pas employer simultanément plus d'une seule des  tactiques n° 2, 3 et 4, sinon vous aurez l'air de guignols.
Dans le style :
"Je n'ai pas cassé la théière que vous m'avez prêtée, parce que :
1) Quand je vous l'ai rendue, elle n'était pas cassée,
2) Quand vous me l'avez prêtée, elle était déjà cassée,
3) Et de toute façon, ce n'est pas à moi que vous l'avez prêtée.
"
Par exemple Jean-Pierre Messager dit "YBM" me les fait simultanément toutes les trois :
"Jacques Lavau n'a pas pu redécouvrir seul la TIQM (Interprétation transactionnelle de la Quantique) car il est physicien au lieu d'être matheux donc il n'est même pas savant, d'ailleurs la TIQM est contraire à l'enseignement hégémonique donc elle est fausse, et de toutes façons tout ce qu'elle énonce on le savait déjà ! La preuve c'est que Cramer réutilise l'expression "réduction de la fonction d'onde" tandis que Lavau écrit qu'on n'en a plus rien à foutre. Alors !".

On laisse au lecteur le soin d'apprécier si "YBM" est un guignol ou pas.
En tout cas c'est un harceleur fanatique depuis neuf ans révolus :
https://groups.google.com/group/fr.sci.physique/msg/0c395cd96bf08451?hl=fr&dmode=source
http://deonto-ethics.org/impostures/index.php?topic=223.0
« Modifié: 14 octobre 2012, 04:04:51 pm par JacquesL »

JacquesL

  • Administrateur
  • Membre Héroïque
  • *****
  • Messages: 4 595
L'expérience de gestion de la Recherche et du Développement, industriels et militaires, est-elle inapplicable à la recherche scientifique universitaire ?
Ce serait l'objection que feraient volontiers ceux qui émargent au CNRS ou à un budget universitaire, et qui obsédés de leur statut privilégié et difficile à obtenir, voudraient conserver tout le territoire pour eux, quelles que soient leurs fautes professionnelles collectives et standards.

Examinons donc quels arguments pourraient disqualifier les outils et principes de la gestion de la R&D, tels qu'ils sont par exemple enseignés au C.N.A.M.

Argument de la finalisation.
Le Department of Defense, qui dirige une des plus gros budgets de R&D de la planète, est intégralement finalisé par missions. Le PERT qui a été élaboré en parallèle sur le projet Polaris de la Marine, vise bien à accomplir les missions en optimisant les coûts et les délais, malgré toutes les difficultés de gros contrats et tâches interprofessionnels.
Les arbres de pertinence, développés par Honeywell pour simuler le DOD et avoir un temps d'avance en anticipant ses prochains appels d'offres, ont bien des missions explicites en racines des arborescences.
Il est donc classique d'argumenter que la recherche publique doit être dégagée de toute mission précise, puisqu'on n'obtient pas des automobiles en perfectionnant des calèches, ni des lampes à arc en perfectionnant des chandelles.
Toutefois cet argument de la liberté et de la sérénité qui devrait automatiquement procurer une recherche de qualité supérieure est contradictoire avec la pratique réelle du ministère : Un projet de recherche en didactique sur "Le contrat de désensorialisation en enseignement des sciences ; abus et remèdes" se voit opposer que ça "n'entre pas dans les thèmes nationaux arrêtés par le ministère de l'E.N.". Il y a donc pour le moins divorce entre la pratique administrative et les discours publicitaires et politiques. Outil politique parfois borné, la bureaucratie prétend tout savoir des besoins en didactique de la nation, et en conséquence fait taire les voix et suggestions imprévues. Une certaine outrecuidance...

L'argument de la "belle sérénité", sonne mal à mes oreilles, pour des raisons biographiques : mon patron de thèse l'utilisait contre tous projets DGRSE (Directions des armements) ; or il n'en sortait rien, de son labo, qu'il dirigeait hors de ses domaines de compétence. Les contrats et leurs échéances avec évaluations externes permettent justement de sonner les cloches à un cadre endormi ou incompétent. Et dans un autre domaine de créativité, les arts, nombreux sont les chefs-d'oeuvre qui ne furent point le fruit de la sérénité, mais de la hâte et de la contrainte - sur un métier très solide il est vrai.

Au delà de mon alerte personnelle, voyons si c'est un fait généralisable.
La vitesse de production des idées, et de leur tri efficace, fut un des secrets de management d'équipe par le Nobel 1976 Baruch Samuel Blumberg.


Un péché originel : Absence de rite initiatique uniforme dans l'industrie.
Dans l'université, le rite initiatique est rigide : vous devez trouver un patron de thèse, trouver une source de financement pour les trois ans de la thèse, accepter le sujet dicté par le patron de thèse et vous enthousiasmer pour la problématique et l'hypothèse que l'on vous dicte, donner satisfaction à vos aînés, alors sera organisée la cérémonie de soutenance, où seuls les déjà-initiés, docteurs ès-sciences ont le droit de vous poser des questions.

L'argument du conte est déjà écrit depuis des siècles : « Tout mémoire de recherches doit être construit comme un conte de fées initiatique. Il y a le jeune héros - c'est vous - qui pris de désir et de passion pour la Connaissance, part à sa conquête en terrain hostile, défendu par de mauvais génies, des dragons et des sorciers - ce sont les imprévus qui vous dérangent dans votre plan de recherches - et qui finalement surmonte tous les obstacles, et ramène ses trophées et sa princesse Connaissance chez les Initiés, qui constatent alors qu'il a bien franchi les épreuves initiatiques, et qu'il peut être admis dans cette Communauté d'Initiés, et qu'il est désormais admis à mépriser tous ces profanes-qui-ne-savent-pas. Bon alors jeune homme, exposez-nous l'Hypothèse dont vous êtes tombé amoureux, et que vous allez défendre en dépit de tout ! ...»

La suite est moins brillante pour le blason universitaire, si l'argent manque, et en général il manque. Les postes rémunérés manquent, et les jeunes post-doc passent souvent des mois voire des années à travailler gratuitement pour leur ex-patron de thèse et son labo, en espérant qu'on pensera à eux quand un poste sera débloqué. Disons que cela renforce les liens féodaux...

Dans l'industrie, on improvise davantage, on débauche les chercheurs des concurrents, on promeut un homme expérimenté qui sait s'adapter à ses nouvelles responsabilités, on renvoie un incompétent ou un homme dépassé à d'autres occupations...

Si, il y a quand même une industrie sclérosée dans ses rites : les établissements de recherches en armement qui sont dirigés par le ministère des armées. Là tout ingénieur qui ne sort pas de l'X sera dirigé par un X. Le résultat n'est pas nécessairement calamiteux,  car il y a quand même un système informatique compliqué d'évaluation de pertinence - aux mains d'un X tout de même - qui assure une certaine cohérence à l'ensemble des travaux.

Ne se reposant pas sur des rites initiatiques unifiés ni sur des féodalités bien stables, l'industrie a été acculée à développer des méthodes d'évaluation et de direction, dont beaucoup portent la marque du pragmatisme américain. C'est ce pragmatisme que les universitaires supportent mal. De plus, une méthodologie des coopérations interprofessionnelles, et la déontologie qui va avec, ça n'est pas leur point fort. Le persiflage interprofessionnel et le complexe de supériorité corporative, voilà qui est fort bien vu et entendu dans les amphis.
« Modifié: 15 octobre 2012, 09:53:36 pm par JacquesL »