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Auteur Sujet: Pas de taxi pour Tobrouk  (Lu 1711 fois)

JacquesL

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Pas de taxi pour Tobrouk
« le: 04 mai 2015, 07:01:52 pm »
http://lavoiedelepee.blogspot.fr/2015/01/pas-de-taxi-pour-tobrouk.html



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mercredi 21 janvier 2015
Pas de taxi pour Tobrouk

Un trou noir stratégique s’est formé à moins de 1 000 km de la France. La Libye n’a jamais été vraiment été un Etat mais un système féodal. Ce système féodal n'a pas réussi à se transformer et il est toujours orphelin d'un roi. Il est inutile de supputer sur les conséquences de l’intervention de 2011 en appui de l'insurrection. Son refus aurait pu mener à une situation encore pire, comme c’est finalement le cas en Syrie.

La vraie opportunité de stabilisation a plutôt eu lieu au moment de la la disparition de Kadhafi alors qu’il était peut-être possible de fédérer les mouvements de résistance encore alliés sous l’égide d’un système international. Il aurait cependant fallu une volonté que bien peu avaient après les expériences afghane et irakienne.

Trois ans après la mort de Kadhafi, il n’y a donc toujours pas de vrai Etat mais il y a quand même deux gouvernements. Le premier est à Tobrouk, à l’extrême est du pays. Il est issu d’un Parlement élu en juin 2014 et qui remplaçait le Conseil national général élu lui-même deux ans plus tôt. Ce gouvernement est reconnu par la Communauté internationale bien plus que par la population libyenne qui s’est très peu rendue aux urnes, par peur des violences partout et par impossibilité même dans certains endroits même comme Koufra ou Derna, première ville en Afrique à faire allégeance à l’Etat islamique en octobre dernier. Bien plus que l’armée nationale libyenne, ce Parlement est soutenu par l’association de l’organisation anti-islamique Dignité du général Khalifa Haftar, installée en Cyrénaïque, et de la milice de Zintan, qui s’efforce de contrôler l’ouest du pays et qui détient toujours Seif al-Islam, le fils de Kadhafi. Cette coalition est soutenue par l’Egypte et les Emirats arabes unis.

Ce parlement est déclaré illégitime par la Cour suprême de Tripoli, capitale du pays aux mains de la coalition Aube de la Libye depuis juillet 2014. Soutenue par le Qatar et la Turquie, Aube de la Libye regroupe plusieurs factions islamistes et la puissante milice de Misrata (peut-être 20 000 combattants), déjà maîtresse du golfe de Syrte et de son « croissant pétrolier ». Un nouveau Gouvernement national général a été reformé à Tripoli en août 2014 qui revendique aussi la légitimité du pouvoir. Entre les deux, la banque centrale et la National oil corporation se sont pour l'instant déclarées neutres et assurent le fonctionnement minimal de l’économie ouverte et la paiement des salaires de fonctionnaires (la grande majorité de la population active libyenne).

Ces deux gouvernements sont loin de contrôler l'ensemble du pays. Benghazi, a été déclaré « émirat islamique » par les jihadistes d’Ansar-al-Charia au mois d’août mais ce pouvoir est lui-même contesté sur place par un groupe proche des Frères musulmans. Au sud, le Fezzan est laissé à lui-même et constitue plus que jamais une plaque tournante de tous les trafics sahariens à partir de ses deux points clés : Segha à l’Ouest, qui permet de rayonner vers l'Algérie, la passe de Salvador au Niger et le Tibesti tchadien ; Koufra à l'Est d'où il est possible de pénétrer au Soudan et au Tchad par Ounianga Kebir puis Faya. Les milices toubous s’y opposent aux Arabes de la tribu Oulad Slimane, tandis que les Touaregs vivants le long de la frontière algérienne ainsi que les Arabes Magariha et Qadafa, toutes tribus ayant soutenu Khadafi, sont marginalisés.

La Libye est donc en cours de somalisation, avec cette différence majeure que c'est une nouvelle Somalie qui menace directement les pays occidentaux et particulièrement la France. Les groupes jihadistes se sont déjà attaqués très violemment aux représentations diplomatiques mais on peut imaginer maintenant de multiples scénarios d’attaques en Méditerranée ou directement sur le sol européen, depuis les avions-suicide partant de Tripoli jusqu’aux commandos infiltrés débarquant sur les côtes en passant par les abordages de navires ou autres modes d'action surprenants. Le sud-ouest du pays est de son côté la base arrière pour le Sahel et sans doute jusqu’en Afrique centrale, à la fois économique et opérationnelle, d'AQMI et d’al-Mourabitoune.

Stabiliser la Libye est désormais difficile. Une opération internationale de stabilisation est pour l’instant inenvisageable. Pour des raisons diplomatiques d’abord, le consensus nécessaire à un mandat du CSNU est devenu désormais une gageure depuis le retour à une guerre « fraîche » avec la Russie, qui s’estime par ailleurs flouée par la tournure de l’intervention de 2011. La ligue arabe de son côté n’est unie que par la réticence à toute opération militaire occidentale sur son sol. Pour des raisons psychologiques et matérielles ensuite, les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, sachant pertinemment qu’une occupation de la Libye prendrait très certainement une tournure « irakienne ». Dans l’état actuel des esprits, une grande opération internationale de stabilisation en Libye ne pourra donc survenir qu’après un choc terroriste de grande ampleur ou une multitude d’agressions de moindre force mais touchant plusieurs pays du pourtour méditerranéen.

Il reste donc pour l’instant la possibilité d’opérations militaires limitées, sous couvert, soit de la demande d’un gouvernement local jugé légitime, soit en invoquant l’article 51 de la charte des Nations-Unies et le droit à l’autodéfense. La « coalition sahelienne », menée par la France et appuyée par les Etats-Unis, pourrait ainsi porter le combat dans le sud libyen sous forme de raids et de frappes contre les éléments ennemis repérés et éventuellement s’associer avec des groupes locaux., toubous en particulier L’avantage opérationnel envisagé est évidemment net mais les conséquences stratégiques restent floues, entre les changements politiques internes que cela peut susciter, les réactions des pays arabes voisins ou les représailles prévisibles y compris sur le sol français. Surtout, il n'est pas évident que cela suffise à produire des effets stratégiques et incite simplement encore à une nouvelle extension du domaine de la lutte. En admettant, ce qui n’est pas évident sans présence au sol, que l’on parvienne à chasser al-Mourabitoune et AQMI du Fezzan, faudra-t-il les poursuivre dans leurs nouvelles bases en Cyrénaïque ? Attaquer aussi l’Etat islamique à Derna ? S’associer aux anciens kadhafistes de Dignité ? Dans tous les cas, jusqu’au sera-t-il possible d’aller avec un effort de défense sans cesse réduit et alors que de nouveaux trous noirs stratégiques, au nord du Nigeria ou le long de la frontière est de Centrafrique, sont en train de s’ouvrir à proximité de nos forces.
Publié par Michel Goya à 1/21/2015

Quoiqu'anonyme, une intervention après l'article se dégage du lot :
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Lybie, Irak, Syrie, Somalie, Sinaï, Nigéria. Autant de régions dans lequel un véritable processus de déconstruction étatique se déroule, ce qui pose la question : quels causes? Bien entendu chacun de ces pays fait face à des difficultés politiques, socio-économiques ou encore ethniques et religieuses propres, pour autant ils sont aussi soumis à une même évolution mondiale. L’accélération de la mondialisation depuis les années 1990 (Disparation de l’URSS accompagnée du démantèlement de la plupart des économies communistes, développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication etc…) s’est accompagné d’un tournant libéral voire néolibéral dans de nombreux pays. En conséquence l’état à eu de plus en plus de difficulté à assurer le contrôle des flux et des richesses, se contentant surtout du rôle de régulateur. Cette évolution a généré des problèmes dans les pays développés mais ceux-ci ont été en partie compensés par la redistribution des richesses via l’impôt. Par contre dans les pays en voie de développement et les PMA l’état à bien souvent été incapable, ou n’a pas voulu, assurer cette redistribution. En conséquence les inégalités se sont creusées tout en étant plus visibles. Surtout le chômage et la précarité se sont développés, facteurs de mécontentement et de désagrégation du tissu social. La crise économique de 2008 semble avoir encore aggravé ces tendances mondiales qui ont à leur tour favorisé un repli sur soi identitaire que l’on peut constater aussi bien en Europe qu’en Asie.

Dans le cas de l’Afrique cela conduit à une aggravation des problèmes préexistant (quasi-absence d’état nation, système de gouvernance familiaux et/ou s’appuyant sur des groupes ethniques, monopolisation au profit d’une partie de la société des ressources naturelles, faible développement des services de l’état). Une autre difficulté est que l’Islam radical est devenu l’expression de toutes les contestations, les attentats de 2001 puis les revers américains en Irak et en Afghanistan lui ayant donné une portée et un prestige considérables sans compter la manne financière des pétromonarchies. Les djihadistes ont la particularité de nous voir comme leur principaux adversaires et s’en prennent dont à nos intérêts en plus des conflits locaux qu’ils mènent. Se pose maintenant une deuxième question : que pouvons-nous y faire ?

Les forces armées occidentales ont le rôle d’un pompier courant de feu en feu et, dans le contexte budgétaire actuel, ayant de moins en moins d’eau pour les éteindre. Il ne nous reste plus qu’à gérer les crises au cas par cas d’autant plus que si elles sont influencées par une évolution mondiale elles répondent avant tout à des causes locales. On peut mener une politique d’interventions coup de poing, de surveillance et d’éliminations ciblées dans l’espoir de maintenir la menace à un niveau acceptable mais avec le risque de la voir s’adapter. Cette politique se doublerait d’un soutien aux états en déliquescences et d’un renforcement de leurs forces de sécurités. C’est ce que semble faire l’armée française actuellement et la stratégie de light footprint promue par Obama correspond en gros à ce concept.

Une autre priorité est d’apporter un soutien sans faille à la jeune démocratie tunisienne. Sa proximité avec le trou noir libyen rend ce pays vulnérable d’autant plus que ses nouvelles institutions doivent encore s’affirmer. Mais nous avons aussi intérêt à soutenir la Tunisie parce que l’établissement d’un état de droit stable, laïque, non corrompu et assurant un certain bien être à sa population serait un formidable exemple pour le monde arabe. Il ne s’agit pas de surestimer l’impact que pourrait avoir ce petit pays mais d’admettre que le libéralisme politique a été plus que décrédibilisé depuis 2003. Si la Tunisie réussit son pari démocratique elle deviendra un exemple que pourront mettre en avant les forces démocratiques du monde arabe, aujourd’hui très affaiblies, et qui les aidera à présenter une alternative crédible aux islamistes.

Citation de: BT
Merci pour cette remarquable analyse aussi pertinente que synthétique. Il n'y a qu'un point qui m'interroge : l'expérience tunisienne mérite tout notre soutien, mais sera-t-elle un exemple pour les autres pays arabes ? Rien n'est moins sûr car le cas tunisien est tout de même spécifique : le "bourguibisme" a marqué ce pays et laissé des traces dans cette société qui ne seront pas faciles à effacer. C'est pourquoi, une " laïcité à la mode tunisienne" pourra peut-être vraiment s'enraciner. C'est bien là qu'est le problème : après l'échec des leaders du nationalisme arabe, trop vite devenus de purs dictateurs, la religion est revenue en force et ses dirigeants ont bien compris la menace que représente pour eux la laïcité. Khomeiny en faisait déjà état. Ils ont bien observé comment dans nos pays laïcs, la religion est vite disparue de l'espace public, reléguée à la sphère privée. Dans un pays comme le nôtre; nous ne sommes plus dans une laïcité de combat (laïcisme anticlérical d'origine) car nous n'en n'avons plus besoin : on sait quel a été l'effondrement de la pratique religieuse. L'Eglise (catholique principalement) n'est plus perçue comme une menace à cause de sa faible influence au niveau de la société. L'opposition des églises lors des derniers problèmes sociétaux n'a pas empêché le vote des lois. Dans leur grande majorité nos concitoyens sont devenus indifférents à la religion : c'est le "ni pour, ni contre " qui triomphe. Les leaders religieux musulmans ont parfaitement analysé et compris la menace que cela représente à terme pour eux. Certains disent actuellement que cette religion est aussi compatible avec la laïcité : voire. J'ai bien peur que cela ne relève du vœu pieux. La religion chrétienne avait dans ses gènes la notion de séparation du temporel et du spirituel : "Rendez à César ce qui est à César et à Dieu, ce qui est à Dieu". Cela a donc été plus facile. Qu'en sera-t-il de l'islam ? Jusqu'à maintenant et pour toute une série de raisons, on a soigneusement évité de poser sérieusement le problème. Il y a bien quelques intellectuels et religieux adeptes de cette religion qui en parlent avec des propos quelques peu révolutionnaires, mais quelle est leur influence réelle dans le monde musulman ?

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Pour répondre à votre question sur le cas de la Tunisie j’ai en effet bien conscience que les conditions pour établir un état laïque sont meilleurs dans ce pays que dans d’autres. De plus je ne surestime pas l’influence que pourrait avoir une nation peuplé de tout juste dix millions d’habitants, ne bénéficiant pas d’une rente pétrolière et étant relativement excentrée vis-à-vis du reste du monde arabe. Malgré tout le développement de la Tunisie en une démocratie prospère et laïque aurait un effet positif majeur, redonner un peu de crédibilité au modèle libéral (entendu au sens politique).

La grande difficulté à laquelle nous devons faire face actuellement est que dans les pays arabes l’espace contestataire est presque monopolisé par les partis islamistes. Dans les années 1950 à 1970 le nationalisme arabe bénéficiait d’une réelle popularité et représentait une idéologie mobilisatrice capable de concurrencer des groupes comme les frères musulmans. Mais la quasi-absence de réalisations concrètes, l’état de faiblesse voir d’asservissement vis-à-vis de l’Occident ont conduit à transformer les états arabes, comme vous le soulignez, en « dictatures classiques ». Les pouvoirs en place se sont maintenus en favorisant la corruption et une répression souvent brutale, alors même qu’économiquement ces pays stagnaient. Logiquement la religion est devenue un espace dans lequel pouvait s’exprimer la contestation qui était proscrite sur la scène publique, et à ce titre l’on pourrait comparer la situation avec celles des anciens régimes communistes d’Europe de l’Est. Mais le modèle libéral occidental est une alternative beaucoup moins séduisante pour les populations des pays arabes que pour celles de l’ancien Bloc de L’Est. Le simulacre d’état démocratique qu’ont entretenu les républiques arabes ont fait perdre de leur force à des concepts comme « des élections libres » ou « un régime républicain ». A cela on peut ajouter la politique de soutien de l’Occident à l’égard des pétromonarchies et des dictatures. Les populations des pays arabes peuvent donc de leur point de vue nous attribuer une partie de leurs malheurs à la différence des anciens pays communistes, ce qui n’aide pas la diffusion de nos idées.

On peut y ajouter une autre grande différence. L’Occident à connut un long et difficile processus de sécularisation au cours du XIXème et XXème siècle. Ça a aussi été le cas du monde musulman dans une certaine mesure mais ici le processus a été plus tardif, incomplet et imposé par le haut. Dans les années 1950 et 1960 ce sécularisme a surtout été une conséquence de l’éducation occidentale qu’avaient reçu les élites lors de l’occupation de leur pays et du fait que les deux grands modèles existants (libéralisme et communisme) étaient d’inspiration laïque. Ce sécularisme imposé n’a pas pu s’enraciner dans les consciences.

Pour terminer il serait intéressant de revenir sur une idée assez répandue, celle que le Moyen-Orient serait condamnée à choisir entre des dictatures laïques et nationalistes ou des régimes théocratiques extrémistes. La réalité est que les dictatures du monde arabe sont la cause principale de la montée des partis islamiques. Incapable d’améliorer, ni même de stabiliser, le niveau de vie de leur population, ayant en grande partie détruit ou réduit au silence les partis libéraux et ne se maintenant au pouvoir que via un mélange de corruption et de répression ils ont poussé dans les bras de radicaux de tous bords leur opposition. En plus de quoi ces dictatures participent elle-même au processus de ré-islamisation de la société. Craignant pour leur avenir elles ont de plus en plus introduits des références à la Charia dans leurs lois (années 1970 pour le Pakistan, amendements à la constitution dans les années 1980 pour l’Egypte). Ces dictatures, loin d’être des boucliers contre l’islamisation des sociétés musulmanes, en sont au contraire à la fois l’une des causes et l’un des acteurs.
« Modifié: 04 mai 2015, 09:27:41 pm par JacquesL »

JacquesL

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L'État islamique sert de prétexte à une nouvelle agression de la Libye.
« Réponse #1 le: 26 mars 2016, 11:25:12 am »
L'État islamique sert de prétexte à une nouvelle agression de la Libye.
http://lesakerfrancophone.fr/etat-islamique-sert-de-pretexte-a-une-nouvelle-agression-de-la-libye

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Le 18 mars 2016 – Source Moon of Alabama

Il existe actuellement deux gouvernements en Libye. Un gouvernement islamiste modéré à l’ouest de Tripoli et un autre à Tobrouk, dans l’est. Celui de l’est est laïc et reconnu internationalement, mais il est aussi soutenu par des groupes salafistes. Les deux gouvernements ont leur propre parlement et chacun est soutenu par quelques milices. État islamique, encadré par des Irakiens et des Syriens, a pris pied à Syrte, au milieu de la longue côte est-ouest. Il recrute des adeptes en Afrique du Nord et se prépare à saisir les champs pétrolifères les plus proches pour financer son expansion.

Ce développement inquiète l’Occident, qui veut intervenir militairement. Les forces spéciales de plusieurs pays sont déjà sur le terrain. Mais les deux gouvernements et leurs parlements ne veulent pas d’une intervention étrangère.

L’ONU ou quelqu’un d’autre a eu l’idée géniale de créer un troisième gouvernement censé remplacer les deux existants. La tâche de ce troisième gouvernement sera d’inviter les forces étrangères et de valider ce qu’elle feront. Ce troisième gouvernement est maintenant constitué en Tunisie et a zéro pouvoir sur le terrain en Libye :

    Rien ne garantit que les autres factions cèdent. Alors, la guerre actuelle entre les deux gouvernements rivaux soutenus par des milices risque de devenir une guerre entre trois gouvernements rivaux, dont aucun ne reconnaît les autres.

Naturellement, les Libyens détestent l’idée d’un gouvernement imposé par l’étranger. Ils vont sûrement lutter contre toute troisième force qui tenterait d’usurper leur souveraineté. Face à un gouvernement imposé par l’étranger et des forces militaires étrangères, davantage de Libyens se joindront à État islamique pour combattre les intrus. Le manque de clairvoyance de l’ONU et des gouvernements occidentaux sur cette question dépasse l’entendement.

Mais il y a encore beaucoup d’argent à faire en Libye et les gouvernements français et britannique en particulier veulent continuer à voler aveuglement le pays. Cela nécessite d’être sur le terrain. Le cerveau et profiteur en chef qui est probablement derrière tout cela, semble être une personnalité bien connue.

Un article révélateur dans le Times of Malta décrit quelques étonnantes connexions politico-commerciales cachées :

    Une importante opération militaire par un groupe de puissances étrangères se prépare contre Isis dans le but d’installer un gouvernement soutenu par l’ONU, mais elle a été si mal organisée qu’elle risque de se retourner contre ceux qui l’ont conçue.

    Premièrement, il y a ceci d’étrange que [l’ambassadeur de Grande-Bretagne en Libye, Peter] Millett est sous les ordres de l’envoyé libyen de la Grande-Bretagne, Jonathan Powell, un contractant du FCO (The Foreign and Commonwealth Office). Oui, le même Powell qui, avec le Premier ministre Tony Blair, avait négocié l’accord avec Mouammar Kadhafi pour mettre fin à l’isolement de son régime dictatorial, il y a dix ans – ce qui a permis ensuite à Blair d’engranger des émoluments substantiels de consultant auprès de ce même tyran, après avoir quitté ses fonctions de Premier ministre.

    Parmi les autres avantages de cette nouvelle ouverture de la dictature de Kadhafi, il y a eu un contrat de développement immobilier massif avec une société présidée par nul autre que le frère de Powell, Lord Charles Powell, qui a également impliqué un réseau célèbre et pittoresque de millionnaires arabes vivant à Londres. Powell est donc très proche d’un acteur qui a là des intérêts.

La Libye est inondée d’armes et de munitions de toutes sortes en vente libre. Il suffit d’avoir de l’argent pour pouvoir acheter de puissantes armes antichars ou des canons anti-aériens faciles à installer sur les tout-terrain Toyota omniprésents. Mais la Grande-Bretagne veut vendre des armes, pas en acheter:

    Millett a révélé qu’il veut vendre encore plus [d’armes] à la Libye – mais seulement aux bonnes milices, celles qui soutiennent le nouveau gouvernement d’accord national (GAN) soutenu par l’ONU.

    Le GAN, conçu pour remplacer les deux gouvernements en conflit, Tripoli et Tobrouk, est la pierre angulaire de la politique occidentale en Libye, il doit unir le pays pour qu’il retourne ses canons sur Isis. D’où les armes.

    L’insistance de Millett à soutenir que les armes iront seulement aux bonnes milices, rappelle la prétention occidentale de soutenir les bons terroristes en Syrie dans la guerre contre Isis.

On en arrive maintenant au vrai business dont l’élément le plus précieux est la Libyan Investment Authority avec ses quelque 65 milliards de dollars d’actifs. Ce fond est détenu par le peuple libyen, mais celui qui le contrôle sera en mesure de siphonner des tonnes d’argent:

    Une grande partie des retombées de cette inapte décision de créer un troisième gouvernement en Libye se fera sentir à Malte, où les batailles commerciales entre les deux gouvernements libyens existants font rage pour arracher le contrôle d’une foule d’entreprises dont le siège est ici – et à qui vont bientôt se joindre les dirigeants du gouvernement d’unité qui en veulent également le contrôle.

    La bataille judiciaire pour la société publique de télécommunications LPTIC a mis en lumière la complexité du problème, et un nouveau bras de fer est en cours pour le contrôle de la Libyan Investment Authority (LIA), dont les bureaux pilotés par Tobrouk sont situés à Malte.

    Pour l’instant, la bataille pour LIA a lieu à Londres, mais, étrangement, le procès a été stoppé en plein milieu, la semaine dernière, sur le conseil du Foreign Office britannique, suscitant la controverse.

    Le juge qui rend l’ordonnance empêchant les deux gouvernements existants de mettre la main sur cet actif de 65 milliards de dollars, n’est nul autre que William Blair, le frère de (devinez qui ?) Tony.

    Peu importe que Tony ait travaillé avec le LIA dans les dernières années du règne de Kadhafi.

    Conflit d’intérêt?

Eh bien, décidez vous-mêmes. Mais pour moi, cela ressemble à un autre coup en préparation, cette fois en introduisant un troisième gouvernement qui sera entièrement contrôlé par des étrangers. Tout cela, non pas pour «combattre l'État islamique», mais pour que Tony Blair et d’autres puissent contrôler et voler tous les actifs qu’il reste aux Libyens. (Et au fait, pourquoi la Fondation Clinton est-elle impliquée dans tout ça?)

Je crois que rien de bon ne sortira de cette misérable tentative de vol déguisée en lutte contre État islamique. Ni pour la Libye et son peuple, ni pour les gens des pays dont les élites se préparent maintenant à nouveau à faire la guerre à la Libye.

Traduction : Dominique Muselet