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Auteur Sujet: La route de la Chine au Moyen-Orient  (Lu 2003 fois)

JacquesL

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La route de la Chine au Moyen-Orient
« le: 19 février 2016, 03:47:18 pm »
La route de la Chine au Moyen-Orient

http://lesakerfrancophone.fr/la-route-de-la-chine-au-moyen-orient
http://www.alaraby.co.uk/english/comment/2016/1/28/chinas-road-to-the-middle-east
Citer
Par Vijay Prashad – le 2 février 2016 – Source Znet

Le président chinois a fait une tournée au Moyen-Orient en rencontrant les représentants politiques des différents camps, une visite en Arabie saoudite étant compensée par une visite en Iran.

Les déclarations les plus importantes de Xi ont été adressées à la Ligue arabe, où il a ouvertement réaffirmé – pour la première fois depuis des décennies – l’engagement de la Chine à l’égard du peuple palestinien. «La Chine soutient le processus de paix au Moyen-Orient», a-t-il dit, et elle soutient «la création d’un État palestinien dont la capitale est Jérusalem-Est».


C’est cette dernière phrase qui a fait frémir les Israéliens.
Xi Jinping et Benjamin Netanyahou

Ils ont refusé de céder sur Jérusalem-Est, aujourd’hui une poudrière violente. Les remarques de Xi en faveur des Palestiniens doivent être entendues dans ce contexte. Elles défendent le point de vue palestinien et rejettent entièrement celui des Israéliens.

C’est ce qui a valu quelques manchettes à Xi, sans plus.

Il ne fait aucun doute que la déclaration de Xi manifeste une franchise nouvelle de la part du gouvernement chinois par rapport au Moyen-Orient. Depuis les années 1990, la Chine avait été réticente à donner ouvertement sa position. C’est le commerce qui commandait l’ordre du jour, pas la politique.

La Chine, aux Nations Unies du moins, parlait de la nécessité de solutions pacifiques et en faveur du multilatéralisme. Ces idées louables trouvaient peu de preneurs à une époque où les États-Unis menaient leur politique à coups de bombes.

Les réticences de la Chine à l’égard du régime de sanctions contre l’Irak dans les années 1990, puis de la guerre en Irak en 2003, ne se sont pas transformées en révolte. Ses diplomates ont émis des protestations feutrées, puis  se sont retirés.

Lorsque le vote sur la Libye est venu devant le Conseil de sécurité de l’ONU en 2011, la Chine – avec les autres pays des BRICS – a décidé de s’abstenir. Mais lorsque l’Occident a outrepassé le mandat de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU, la Chine – avec la Russie – a décidé de prendre une position plus ferme dans la région.

Depuis 2011, la Chine et la Russie ont bloqué toute tentative de l’Occident d’obtenir une résolution du Conseil de sécurité en faveur d’une guerre en Syrie. La Chine et la Russie, ainsi que la majeure partie de l’hémisphère Sud, s’opposent à de nouvelles opérations visant à des changements de régime. La Libye a été la goutte de trop.

Cela a poussé ces pays, qui occupaient le siège arrière depuis le début des années 1990, à défendre leurs alignements politiques avec plus de détermination. La Chine a commencé à mener des exercices militaires avec la Russie, qui comprenaient un important exercice naval en Méditerranée l’été dernier.

C’était une importante démonstration de force de ces deux puissances mondiales.

Les interdépendances commerciales actuelles de la Chine empêchent toutefois tout virage radical. Lors de sa visite, Xi a dû consolider les relations de la Chine avec l’Arabie saoudite et l’Égypte.

L’Arabie saoudite étant le principal fournisseur de pétrole de la Chine, Xi a dû produire des sons agréables à l’oreille des Saoudiens à propos de leur guerre au Yémen, au sujet de laquelle les diplomates chinois expriment discrètement leurs préoccupations.

La compagnie pétrolière de l’État chinois, Sinopec, et celle de l’Arabie saoudite, Aramco, ont signé un important accord-cadre de coopération stratégique. Les discussions concernant la vente d’une partie d’Aramco sur le marché n’ont pas remis ces liens en cause qui vont durer, que le capital d’Aramco soit dilué ou non.

La Chine a réaffirmé ses liens avec l’Égypte, à la veille du cinquième anniversaire de la révolution égyptienne, principalement parce que la Chine dépend du canal de Suez, une voie de passage majeure pour les produits chinois à destination de l’Europe.

Les relations de la Chine avec l’Arabie saoudite et l’Égypte sont fondées sur le présent : l’économie chinoise compte pour le moment sur le carburant et les voies de transport fournis par ces puissances. La visite de Xi à l’Iran laisse présager que cette dépendance ne sera pas éternelle.

La Chine est aussi le principal partenaire commercial de l’Iran et lui a procuré une bouée de sauvetage pendant l’imposition des sanctions. Xi et le président iranien Hassan Rouhani ont dit l’un et l’autre que le maintien des liens pendant cette période avait instauré une grande confiance entre Téhéran et Pékin. «La Chine est prête à augmenter le niveau des relations bilatérales avec de la coopération», a dit Xi à la télévision iranienne, maintenant que la période des sanctions est terminée. L’Iran propose de vendre davantage de pétrole à la Chine et d’en accroître le volume de manière spectaculaire pendant les dix prochaines années.

Cela rendra la Chine moins dépendante du pétrole saoudien.

Au cours de la dernière décennie, la Chine était affairée à construire la Nouvelle route de la soie, qui devrait s’étendre des côtes chinoises à l’Europe en passant par l’Asie centrale et l’Iran. Des réseaux de chemin de fer et de routes ont été construits au nord de l’Iran pour relier l’Afghanistan à la Turquie.

L’an dernier, le China Railway Group [entreprise chinoise de travaux publics, connue aussi sous l’acronyme CREC, NdT] a remporté un contrat pour construire une partie du chemin de fer qui doit relier Budapest et Belgrade. La Nouvelle route de la soie part maintenant de la zone industrielle de Shenzhen, sur la mer de Chine méridionale, pour aboutir au cœur de l’Europe de l’Est.

La dépendance au canal de Suez ne fera pas partie des calculs stratégiques de la Chine encore longtemps.

La relation qui se bâtit entre la Chine et l’Iran, autrement dit, pourrait réduire l’importance de l’actuelle dépendance de la Chine à l’Arabie saoudite – pour le pétrole – et à l’Égypte – pour le transport. Les diplomates chinois disent en privé que l’orientation pro-occidentale des États arabes du Golfe est un obstacle pour les planificateurs chinois. Ils souhaiteraient plus de souplesse dans leurs engagements commerciaux. L’entrée récente de l’Égypte dans l’orbite de l’Arabie saoudite accroît ces préoccupations. La Chine disposerait d’une marge de manœuvre limitée si l’Occident exerçait des pressions autres qu’économiques sur ces pays pour couper l’herbe sous le pied de Pékin.

C’est cette crainte des alliés occidentaux en mer de Chine méridionale et dans le détroit de Malacca, comme Singapour, qui a conduit la Chine à construire les ports de Kyaukpyu, au Myanmar, et de Gwadar, au Pakistan. Ces ports permettent d’éviter les goulets d’étranglement en Asie du Sud-Est. La Nouvelle route de la soie contournera le canal de Suez.

Xi est connu pour ses positions sur la nécessité du multilatéralisme dans les affaires mondiales. Le lien entre la Russie et la Chine a été renforcé après la crise ukrainienne de 2014, que les Chinois considèrent comme une tentative orchestrée par l’Occident pour affaiblir la Russie.

L’engagement de Xi envers le bloc des BRICS est représentatif de sa volonté de créer différents pôles comme contrepoids à l’hégémonie occidentale. Son voyage dans le monde arabe doit être vu sous ce jour, comme une tentative de consolider le soutien de partenaires commerciaux nécessaires pour le moment (l’Arabie saoudite et l’Égypte), tout en manifestant son soutien à ceux qui donneront à la Chine librement accès au pétrole et aux marchés (l’Iran).

La déclaration de Xi sur la Palestine n’est pas une réminiscence du soutien historique de la Chine à la cause palestinienne. Nous sommes loin de 1964, le moment culminant de la solidarité sino-palestinienne. Cette année-là, la Chine avait été le premier État non arabe à reconnaître l’OLP.

Pendant son voyage dans la région, Zhou En-Lai avait dit : «Nous sommes prêts à aider les pays arabes à regagner la Palestine. Quand vous serez prêts, dites-le nous. Nous serons prêts aussi. Nous sommes disposés à vous donner tout ce dont vous avez besoin, des armes et des volontaires

La Chine avait promis cette année-là d’honorer le boycott d’Israël du Secrétariat de la Ligue arabe en annonçant qu’aucun navire israélien ne serait autorisé dans les eaux territoriales chinoises. Une délégation de l’OLP, dirigée par Ahmad Choukeiri, s’est rendue à Beijing en 1965. Mao a déclaré le 15 mai Journée de Solidarité avec la Palestine.

Lors d’un rassemblement de masse, en présence de la délégation de Choukeiri, Mao a établi un lien entre Israël et Taïwan (Formose), en tant que «bases de l’impérialisme en Asie». «Vous êtes la porte d’entrée du grand continent, a-t-il dit. Et nous sommes la porte arrière.» L’Occident utilise Israël et Taïwan comme des tremplins vers l’Asie, a-t-il affirmé. «La bataille arabe contre l’Occident, a dit Mao, est la bataille contre Israël. Donc boycottez l’Europe et l’Amérique, ô Arabes !» (al-Anwar, 6 avril 1965).

Xi ne parle pas comme ça. Sa manière est plus douce. Il unit la sensibilité commerciale de Deng Xiaoping à la vision anti-occidentale de Mao. La suspicion sur les motivations occidentales est partagée par de nombreux responsables parmi les dirigeants chinois et iraniens.

Mais les jours tranquilles de la Chine semblent révolus. Parler ouvertement de la Palestine et de son droit sur la partie orientale de Jérusalem ne concerne pas seulement ce bout de terre, mais révèle aussi la confiance de la Chine à dire ouvertement ce qu’elle n’a dit qu’en privé pendant des décennies.

Article original paru sur The New Arab

Traduit par Diane, vérifié et relu par Ludovic et Daniel pour le Saker francophone

JacquesL

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Bonne nouvelle pour le monde entier, plus de soucis à se faire pour la mer de Ch
« Réponse #1 le: 19 février 2016, 03:47:59 pm »
Bonne nouvelle pour le monde entier, plus de soucis à se faire pour la mer de Chine
http://lesakerfrancophone.fr/bonne-nouvelle-pour-le-monde-entier-plus-de-soucis-a-se-faire-pour-la-mer-de-chine
http://www.unz.com/plee/good-news-world-you-can-stop-worrying-about-the-south-china-sea/
Citer
Par Peter Lee – Le 23 janvier 2016 – Source UNZ



On assiste à une campagne médiatique concertée pour présenter la mer de Chine (MdC) comme une voie indispensable pour le transport commercial, fournissant une bonne raison aux États-Unis pour surveiller et intervenir dans cette zone.

Le porte-parole de cette campagne évoque une valeur de $5 mille milliards de marchandise traversant la mer de Chine chaque année. Reuters en particulier est accro à cette formulation.

Voici sept dépêches de l’agence Reuters, datées du mois dernier, évoquant ce chiffre de $ 5 mille milliards :

    La Chine dit que la militarisation de la mer de Chine dépendra du niveau de menace.

    La Chine cherche des investissements pour les îles disputées, à établir des vols réguliers.

    La Chine défend les atterrissages sur les récifs après les plaintes vietnamiennes.

    Les Philippines déposent une plainte contre les vols aériens chinois en mer de Chine.

    La Chine fait encore atterrir des avions sur les iles de mer de Chine faisant l’objet d’une dispute : Xinhua.

    Des manifestants philippins atterrissent sur les îles de mer de Chine objet d’un litige.

    Les tensions s’accroissent autour de l’atterrissage d’avions chinois sur les îles artificielles.

Ce qui attire mon attention dans ces sept articles est qu’ils sont le travail de six reporters et sept rédacteurs en chef (sept à six ! heureux de voir que Reuters garde la main sur les ratios importants) dans cinq bureaux et qu’ils utilisent tous cette même formulation. Comment est ce que cela fonctionne ? Est-ce que la maison mère donne l’ordre que tous les articles au sujet de la mer de Chine (MdC) doivent inclure la phrase magique à $5 mille milliards ? Est-ce que le logiciel de traitement de texte repère tous les textes ne mentionnant pas le chiffre magique ? Ou est-ce que la ruche de journalistes qui relie Pékin, Manille, Hanoï, Hong Kong et Sydney sont sur la même longueur d’onde et ont simultanément et unanimement décidé que ce chiffre soit l’accessoire indispensable à tout reportage sur la MdC ?

Mais c’est compréhensible. Une description plus précise de la mer de Chine, du genre : «Un canal maritime pratique mais pas indispensable pour le transport maritime mondial dont l’importance, quand elle est savamment exagérée, donne un bon prétexte aux États-Unis pour se mêler des affaires de l’Asie du sud-est, au dépends de la République populaire de Chine (RPC)» est un peu trop long et ne donne pas assez l’impression d’urgence.

L’entourloupe, bien sûr, est que la part du lion de ces $5 mille milliards ressort du commerce chinois et que la plupart passe par la MdC par choix et non par nécessité.

Dit autrement, la seule grande puissance ayant un intérêt stratégique vital pour la liberté de navigation en mer de Chine est la Chine elle-même. Et les puissances intéressées à y gêner la liberté de navigation sont toutes les autres, guidées par les États-Unis.

Regardons plutôt une carte.



Vraiment les mots me manquent.

Voici la carte qu’il faut éviter de regarder. Celle si souvent reproduite et détournée par le Département américain à l’Énergie où les tentacules du monstre du transport d’hydrocarbures se tordent dans la MdC.

Regardons plutôt la carte du trafic maritime sur un site web beaucoup plus intéressant qui montre des informations en temps réel sur le transport maritime et quelques données historiques, gratuitement. Elle donne une idée des vrais circuits maritimes de la région.

Si vous sélectionnez l’option density map et y zoomez, vous obtiendrez une vue des voies maritimes (lignes vertes) et des ports (cercles rouges) les plus fréquentées dans et autour de la mer de Chine.



Notons quelques caractéristiques du trafic maritime en mer de Chine. D’abord et sans surprise, il converge essentiellement vers la Chine. Ensuite, le Vietnam, l’Indonésie, Taïwan et les Philippines sont surtout desservis par des routes longeant les côtes bien loin de la si redoutée ligne des neuf tirets (Nine Dash Line en anglais. NdT) tracée par la Chine.

Enfin, le reste du trafic transitant par la MdC se dirige tout droit vers le Japon et la Corée du Sud. Cela semble confirmer la perception que le Japon et la Corée du Sud, de précieux alliés, ont besoin de protection contre les menaces sur leur approvisionnement en pétrole, ce bien indispensable, leurs économies, la sécurité de la nation et leur mode de vie mêmes étant en jeu à cause de la présence de la Chine à proximité de cette voie stratégique.

Mais pas vraiment.

L’insignifiance stratégique de la MdC pour le Japon et la Corée est bien connue depuis les années 1990 quand la sécurité énergétique devint une préoccupation majeure des stratèges japonais.

Voici un passage intéressant d’un livre d’Euan Graham intitulé La ligne de sécurité maritime japonaise : Une question de vie ou de mort ?, publié en 2005.

    Le coût pour le Japon d’une fermeture de 12 mois de la MdC, en faisant passer les tankers pétroliers par le détroit de Lombok et l’est des Philippines, a été estimé à $200 millions. Le Japon estime que ce coût est le même que celui entraîné par la fermeture du détroit de Malacca, nécessitant 15 tankers supplémentaires et augmentant de $88 millions les coûts de transport. Ce coût est confirmé par une étude conjointe du JDA et des autorités indonésiennes de la fin des années 1980, qui estimait à 18 le nombre de tankers supplémentaires pour contourner la mer de Chine par Lombok et l’est des Philippines.

    … Le volume de pétrole transporté est également réparti entre Lombok et le détroit de Malacca…

Voici une jolie carte montrant la route de Lombok et mentionnant aussi la seule différence avec Malacca – deux jours supplémentaires de navigation sur 20 jours en passant directement à travers la mer de Chine. Remarquez aussi, comme le montre le graphique, que les plus gros tankers, ceux de plus de 300 000 tonnes, ne peuvent utiliser que la route de Lombok.



Que représentent deux jours de plus de navigation ? Selon Graham :

    …sur une facture totale d’importation de pétrole de $35 milliards, [un coût de $88 millions supplémentaires pour la route de Lombok] représente 0,3% de la facture totale.

Pour mettre à jour ces chiffres, le marché du pétrole et des tankers a plutôt tourné au vinaigre ces derniers temps, comme tout le monde le sait. Les prix du brut ont chuté alors que ceux des tankers ont monté car les importateurs font des réserves stratégiques et, de temps à autre, gardent les tankers comme facilité de stockage au lieu de les renvoyer au large. Les derniers chiffres que j’ai pu me procurer sont de 2,5$/baril pour un voyage du Golfe jusqu’au Japon.

Disons 30$ pour un baril de brut et 3$ de frais de transport. Le Japon importe environ 2 milliards de barils par an. Cela fait $6 milliards pour le transport. Le passage par Lombok rajoute 10% soit 0,3$/baril au frais de transport donc $600 millions de plus sur les 60 milliards d’importation de pétrole, 1% du coût total. Coïncidence surprenante, $600 millions représentent aussi 1% du budget total de la défense du Japon. Le PIB du Japon est de $4 mille milliards.

Alors est-ce que le Japon va déclencher la troisième guerre mondiale pour garder une prétendue vitale MdC ouverte et économiser 1% de sa facture pétrolière ?

Voici quelqu’un qui ne le pense pas :

    Le CSD [L’auto défense collective] ne permettra pas d’opérations de déminage en MdC/Détroit de Malacca car, à la différence d’Ormuz, il existe des routes alternatives.

C’est la déclaration d’un fameux pacifiste [ton ironique, NdT], le Premier ministre Shinzo Abe, faite devant la Diète [le parlement japonais, NdT], rapporté par un tweet de Corey Wallace.

La république de Corée du Sud importe moins d’un milliard de barils par an. Coût du détour par Lombok, environ $270 millions.

En fait, tout le monde préfère utiliser le détroit de Malacca/MdC pour aller du golfe Persique au Japon et en Corée du Sud. C’est le plus court, le moins cher, il y a Singapour sur le chemin et, en vérité, les armateurs regardent les chiffres et ont décidé de retarder la construction de très très grand tankers pour garder l’option de passer par le détroit de Malacca et la MdC.

Mais si cette route était bloquée, ils peuvent toujours passer par Lombok et la mer de Makassar. C’est juste un peu plus cher.

Donc, la mer de Chine n’est pas une voie maritime critique pour le Japon et la République de Corée, nos principaux alliés asiatiques.

Qu’en est-il de la menace aux antipodes ? Notre grand allié l’Australie ? Si la Chine bloquait la MdC, quelles conséquences pour les exportations australiennes (ailleurs que vers la Chine naturellement) ?

Extrait tiré du livre d’Euan Graham cité ci-dessus :

    Le transport de lingots de fer et de charbon représente la majorité des mouvements à travers le détroit de Lombok… Lombok reste la principale route pour les grosses cargaisons allant d’Australie occidentale au Japon.

Ils utilisent donc déjà le détroit de Lombok !

Quant au facteur mer de Chine, Sam Bateman, un commandant à la retraite de la marine australienne qui est maintenant analyste à Singapour, a remis en question un douteux article de numérologie écrit par Bonnie Glaser :

    Bonnie Glaser a récemment prétendu qu’environ 60% du commerce maritime australien passe par la MdC…

    Quantifié en valeur financière, le chiffre de 60% du commerce maritime passant par la MdC est loin du compte. En se basant sur les dernières données australiennes, il serait plutôt moitié moins, les trois quarts étant destiné au commerce avec la Chine. Donc la notion de menace sur notre commerce avec la Chine est plutôt absurde.

Calculons en valeur monétaire, 25% de 30% donne donc 7,5% du transport maritime à travers la MdC qui n’est pas destiné à la Chine. Soit 40 milliards de dollars australiens, dont la moitié va et vient de Singapour, ce qui peut être fait en pénétrant dans détroit de Malacca par l’ouest et en évitant complètement la MdC. A peu près 20 milliards de dollars australiens théoriquement à risque dans le cas peu probable où la Chine décide de complètement fermer la MdC au transport maritime australien. Par comparaison, le commerce bilatéral australien avec la Chine est de 152 milliards de dollars australiens.

Si vous vous demandez en quoi ce débat agité au sujet d’une confrontation entre la Chine, le plus gros client de l’Australie pour les lingots de fer et l’immobilier, et l’Australie à propos de la MdC sert vraiment les intérêts nationaux de ces pays, je pense que vous avez maintenant la réponse.

Euan Graham, directeur actuel du Lowy Institute’s International Security Program, a récemment fait la remarque, à la télévision australienne, que la géographie ne change pas. Sans rire.

Cela vaut la peine de regarder son discours d’analyse du problème de la MdC.

Remarquez qu’il n’entame pas la rengaine d’une MdC axe maritime vital pour le commerce australien sous la menace chinoise. Il parle plus de l’Australie faisant de son mieux pour agir en tant qu’allié volontaire, si ce n’est impatient, des États-Unis en Asie, ou, comme Graham le dit de payer sa police d’assurance, de lois internationales et de libre mouvement des forces navales.

Il devrait être évident pour tous que la mer de Chine, en tant qu’avenue commerciale est surtout importante pour… la Chine, bien sûr, plus que pour le Japon, la Corée du Sud, l’Australie ou les États-Unis.

Pourtant, ironie de l’histoire, la MdC devient de moins en moins importante pour la Chine, puisqu’elle construit un réseau alternatif de ports, oléoducs et réserves énergétiques.

L’idée que la Chine puisse s’échapper de son étranglement maritime est un anathème aux États-Unis, qui a basé sa réputation, son droit au rôle géostratégique central et ses demandes budgétaires sur l’idée que la menace de la marine américaine contre leurs voies maritimes d’approvisionnement en énergie, est le facteur décisif qui tient les cocos en respect. L’intérêt des États-Unis pour contrôler la Chine et la MdC existait bien avant l’expansionnisme d’un Xi Jinping qui construit sur les îles et précède aussi une marine chinoise digne de considération. On peut remonter la trace de cet intérêt américain à un rapport de 2004, préparé par Booz et Hamilton, pour Donald Rumsfeld, intitulé Energy Futures in Asia.

Je pense que ce rapport n’a pas été déclassifié, mais les lecteurs intéressés peuvent se reporter à cet article de l’US Naval War College intitulé Vos pauvres plans d’oléoducs ne réussiront jamais, idiots de Chinois ! Regardez la force de la marine américaine et tremblez ! (Le vrai titre, Le rêve chinois d’oléoducs, n’en est pas si loin).

C’est vrai que le pétrole du Moyen-Orient, celui qui est livré par bateau, va encore probablement être un sacré casse-tête pour la Chine pendant des dizaines d’années. Mais la Chine essaye de trouver des solutions sans se soucier des conseils amicaux et désintéressés de ses amis occidentaux de l’US Navy.

Regardons encore une carte. L’initiative de la nouvelle Route de la Soie va ouvrir de nouveaux canaux de transport pour les marchandises et l’énergie pour la Chine, qui évitent la MdC.


Pendant que vous y êtes, cherchez la mer d’Andaman, celle entre la Birmanie et l’Inde, à l’ouest de la MdC et du détroit de Malacca. La Chine y a déjà construit un terminal à Maday, dans l’État de Rakhine, Birmanie, et l’a relié à Kunming, en Chine, par des oléoducs et gazoducs pour, comme l’a fait remarquer le journal The Hindu, contourner le piège de Malacca.



Et ces petits hommes en rouge, à propos ? Des bataillons de l’armée birmane. La sécurité des oléoducs est une affaire importante pour le gouvernement chinois, quelque chose qu’il est prêt a assumer même s’il faut, pour cela, faire chanter le gouvernement birman avec des menaces de révoltes dans les zones frontalières, comme l’a déjà visiblement compris Aung San Suu Kyi.

Pour le transport de containers, la Chine prévoit apparemment de continuer la voie TGV qu’elle construit en direction de Bangkok jusqu’à un nouveau port en eau profonde au sud de la côte de Maday, en Birmanie, jusqu’à Dawei (au lieu de continuer de poursuivre le rêve d’un oléoduc dans le canal de Kra, traversant l’isthme séparant la mer d’Andaman et le golfe de Thaïlande).

Regardez aussi Gwadar. La Chine s’est engagée à investir des dizaines de milliards dans le cauchemar logistique, géopolitique et insurrectionnel pakistanais qu’est le Boondoggle dans le Baloutchistan avec l’espoir d’expédier pétrole et gaz par-dessus l’Himalaya, juste pour avoir une autre option afin d’éviter la MdC.

Les oléoducs sont bien sur plus chers à utiliser et plus vulnérables aux attaques par des insurgés locaux ou des forces plus mystérieuses, comme le font remarquer, comme par hasard, les analystes stratégiques américains. Les ports hébergés par un pays tiers sont sujet à des attaques ou interférences par des gouvernements ou des factions pro américaines. Malgré tout, la Chine les construit. Si les États-Unis peuvent dépenser $500 mille milliards pour leur sécurité nationale, la Chine est aussi désireuse de parier quelques milliards pour sa sécurité énergétique (tout en enrichissant les constructeurs chinois) et supporter le poids financier supplémentaire pour transporter le pétrole et le gaz d’un point A un point B sans passer par le détroit de Malacca.

Ce qui veut, bien sur, dire qu’il est temps de battre la campagne médiatique d’une Chine menaçant l’océan Indien.

Et bingo, nous y voila : des officiels américains se posent des questions sur les intentions de la Chine quand elle s’avance dans l’océan Indien.

Comme l’indiquent ces dépenses massives de la Chine – et l’absence complète de menaces sérieuses contre les intérêts du Japon, de la Corée et de l’Australie – le seul rôle véritable joué par la MdC, comme zone stratégique d’étranglement digne de l’attention des US, est… contre les intérêts de la Chine elle-même.

La mauvaise nouvelle est qu’avec une Chine ne mettant pas tous ses œufs dans le même panier, si une vraie guerre devait commencer contre la Chine par une tentative d’étouffement, en la coupant de ses importations énergétiques, comme cela s’est produit contre la Japon dans les années 30 – analogie historique utile, n’est-ce-pas ? – il faudrait le faire dans un grand nombre d’endroits comme Djibouti, la Birmanie, l’Océan Indien et en MdC. Une vraie guerre mondiale !

La bonne nouvelle est qu’au fur et à mesure que les choix maritimes augmentent pour la Chine, l’importance stratégique de chaque voie prise individuellement diminue, de même que le désir de la Chine, du Japon, de la Corée ou de l’Australie de risquer la paix régionale pour une affaire devenant sans importance.

J’espère que la Mer de Chine, au lieu de servir de détonateur pour la troisième guerre mondiale, restera simplement une scène de démonstration impériale où les États-Unis et la Chine font jouer leurs muscles pour démontrer leur résolution aux voisins et alliés, tout en restant une opportunité de gesticulations politiques, d’augmentation des budgets de défense et un terrain de chasse pour les médias à sensation et les groupes de réflexion.

Comme cela tout le monde sera content.

Peter Lee

Article paru sur UNZ

Traduit par Wayan, relu par Ludovic pour le Saker Francophone.

JacquesL

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Que se passe-t-il réellement en mer de Chine du Sud ?
« Réponse #2 le: 09 mai 2016, 05:23:42 pm »
Que se passe-t-il réellement en mer de Chine du Sud ?
http://lesakerfrancophone.fr/ue-se-passe-t-il-reellement-en-mer-de-chine-du-sud
http://journal-neo.org/2016/04/26/what-is-really-happening-in-the-south-china-sea/

Citer

Que se passe-t-il réellement en mer de Chine du Sud ?

Par James O’Neill – Le 26 avril 2016 – Source New Eastern Outlook

La Mer de Chine du Sud serait, de l’avis de nombreuses publications occidentales, le prochain point de contentieux potentiel sur la scène géopolitique mondiale. La rhétorique officielle est aussi agressive qu’elle est mal informée, se fixant sur une prétendue agression de la République populaire de Chine qui déclare sa souveraineté sur une large étendue maritime de la mer de Chine du Sud, bien au-delà de ses eaux territoriales (limite des 12 milles marins) et de sa zone économique exclusive (limite des 200 milles marins) que la loi internationale reconnaît.


Cette rhétorique excessivement dramatique de la part des États-Unis, a mené au moins un analyste politique à qualifier ces soi-disant analyses de la situation en mer de Chine du Sud comme étant «le plus gros tas de sottises analytiques sur l’Asie du Sud-Est, depuis que la CIA a confondu en 1981 des déjections d’abeilles avec des souches d’armes bactériologiques d’origine russe».

La discussion au sujet de la mer de Chine du Sud contient plusieurs éléments qui doivent être examinés séparément, avant d’envisager des conclusions sur leur éventuelle importance. Il est utile, pour comprendre la situation, de comparer les différentes revendications territoriales en mer de Chine du Sud.

La majorité des arguments récents porte sur la zone de mer de Chine du Sud contenue à l’intérieur de la limite appelée la Ligne en 9 traits. Il s’agit d’une ligne en neuf pointillés dessinés sur une carte, tirant vers le Sud à partir de l’île chinoise de Hainan, longeant la côte vietnamienne, pour ensuite remonter vers le Nord en direction de la Chine, en englobant des zones entières appartenant aux zones économiques exclusives du Vietnam, de la Malaisie, de Brunei, des Philippines et de Taïwan.

La première remarque à faire, à propos de la Ligne en 9 traits, est qu’elle fut établie par le gouvernement nationaliste chinois dirigé par Tchang Kaï-chek en 1948, soit deux ans avant l’établissement de la République populaire de Chine. Lorsque le gouvernement nationaliste fut expulsé de Chine continentale et s’établit à Taïwan, le gouvernement taïwanais conserva à peu près les mêmes revendications territoriales au sein de la Ligne en 9 traits, tout comme la République populaire de Chine.

Les revendications taïwanaises perdurent à ce jour. Taïwan maintient une présence militaire sur l’île de Taiping (Itu Aba), la plus grande de l’archipel des Spratleys, à environ 1 600 kilomètres au sud-ouest de Taïwan. Taïwan maintient une autre présence militaire sur les îles Dongsha (Pratas) à environ 400 kilomètres au sud de ses côtes.

En février 2008, les Taïwanais ont construit une piste d’atterrissage de 2 000 mètres de long sur l’île Taiping. Alors que ces deux îles sont bien en dehors de la zone économique exclusive revendiquée par Taïwan, aucun gouvernement occidental, incluant l’Australie et les États-Unis, n’ont trouvé à redire à cette activité de nature militaire.

Les îles Spratleys sont un archipel de 230 îles, récifs coralliens, îlots et bancs de sable, dont seulement une trentaine émerge de l’eau à marée haute. Des six pays qui revendiquent les îles Spratleys, seul le royaume de Brunei n’y a pas bâti de structures sur pilotis, comme ceux qui existent sur la quarantaine d’îlots et récifs coralliens. Malgré cela, les médias occidentaux se focalisent exclusivement sur l’activité agressive de construction de terre-plein et de bâtiments pratiquée par la Chine.

Une des raisons des constructions sur ces îlots artificiels, est de permettre à leur propriétaire de revendiquer les droits exclusifs d’exploitation économique des eaux environnantes. Pourtant, selon le droit international, l’occupation de simples rochers, récifs coralliens et bancs de sable, ne peut servir de base légale à une revendication pour une exploitation économique d’une zone maritime.

Mais cette activité de construction ne se limite pas à la mer de Chine du Sud. Le Japon revendique la souveraineté sur un atoll inhabité appelé Okinotorishima, situé à 1 700 kilomètres au sud de Tokyo, là aussi très au-delà de toute zone maritime pouvant faire partie des eaux territoriales japonaises. Le gouvernement japonais a dépensé des milliards de dollars pour y créer une île artificielle bétonnée, érigée à 1,50m au-dessus du niveau de la mer, sur laquelle est installée une station de recherche. La zone environnante est primordiale en termes d’intérêt économique et militaire, ce qui laisse entrevoir les vraies motivations du Japon.

La validité des revendications japonaises sortent du cadre de cet article. Ce qui est intéressant ici, est que les activités du Japon, identiques à celles de la Chine en mer de Chine du Sud, n’ont déclenché aucune réaction hostile de la part de l’Australie ou des États-Unis.

Le second élément de la rhétorique des États-Unis et de l’Australie, est que les activités de la Chine en mer de Chine du Sud, menaceraient la liberté de navigation dans un espace maritime où transitent au moins 5 000 milliards de dollars d’échanges commerciaux internationaux chaque année.

Il est exact d’affirmer que la mer de Chine du Sud est une voie importante du commerce maritime international, mais il existe au moins trois bémols à cette affirmation, largement ignorés par les médias occidentaux qui exagèrent les menaces potentielles à la liberté de navigation.

Le premier élément est que, contrairement aux affirmations contenues dans le Rapport australien sur la Défense de 2015, seul 20% du commerce de l’Australie avec l’Asie transite par la mer de Chine du Sud, et que la majorité de ce commerce est destiné à, ou en provenance de la Chine. Les 80% restants du commerce de l’Australie avec l’Asie, empruntent une route maritime qui passe à l’Est de Singapour et des Philippines [donc en dehors de la mer de Chine du Sud, NdT].

Le second élément saillant est que personne, et surtout pas les porte-parole gouvernementaux belliqueux de Washington et Canberra, n’est capable de produire une seule déclaration émanant d’un officiel chinois, ni de dénoncer un seul acte de la part de la République populaire de Chine, qui menacerait la liberté de navigation.

Et troisièmement, la grande majorité du commerce maritime transitant par la mer de Chine du Sud est destiné à, ou en provenance, de la Chine. Le plus grand perdant dans un scénario de blocus maritime serait la Chine elle-même. Cela n’a aucun sens pour elle, de se comporter d’une manière qui serait en contradiction avec la protection de ses intérêts économiques et politiques. Mais la logique n’intéresse pas la plupart des commentateurs occidentaux.

Une des raisons invoquées par les États-Unis, l’Australie, et d’autres États pour leurs activités militaires en mer de Chine du Sud, est la préservation de ce qu’ils appellent la liberté de navigation, ce par quoi ils entendent le droit de passage libre dans les eaux internationales, à savoir en dehors de la limite des 12 milles nautiques.

Ce principe n’est pourtant pas appliqué de façon systématique par les États-Unis, soit directement à eux-mêmes, soit par leur soutien public à d’autres États qui violent ce qu’on nous explique être un droit inaliénable. Israël, par exemple, pratique régulièrement un blocus naval contre le Liban, de façon répétitive et pour de longues périodes depuis 1975, ainsi que contre la Bande de Gaza depuis 2000, sans une seule protestation des États-Unis ou de l’Australie.

Les États-Unis ont eux-mêmes imposé à plusieurs reprises des blocus maritimes pour atteindre leurs objectifs géopolitiques, par exemple contre Cuba, le Vietnam, la République fédérale de Yougoslavie et l’Irak, pour ne mentionner que les cas les plus connus. Aucune de ces violations de la liberté de navigation ne reposait sur une base juridique internationale.

Les pays limitrophes de la mer de Chine du Sud ont pris des mesures pour créer un cadre de résolution pacifique des différends maritimes qui sont apparus depuis que les pays en question ont commencé à faire valoir leurs revendications. Il est peut-être inutile de préciser que ce cadre de résolution des différends entre voisins n’inclut pas les États-Unis ou l’Australie.

En 2002, par exemple, les pays membres de l’ASEAN et la Chine ont signé une Déclaration sur la conduite des négociations entre parties intéressées en mer de Chine du Sud. Cette déclaration avait pour ambition de «consolider et développer l’amitié et la coopération entre les peuples et les gouvernements, en vue de promouvoir un partenariat de bonnes relations de voisinage et une confiance mutuelle au XXIe siècle».

La promotion de ces partenariats n’a pas été rendue aisée, à cause de toutes les interférences extérieures. En octobre 2008, par exemple, le gouvernement de Taïwan a annoncé qu’il comptait collaborer avec la Chine pour le développement de champs pétroliers et gaziers en mer de Chine de l’Est et du Sud. Les États-Unis ont tué cette initiative dans l’œuf en usant de leur ascendant sur Taïwan.

En 2014, la Chine et les Philippines ont trouvé un accord sur la question du Haut-fond de Scarborough, un agrégat de rochers et de récifs coralliens à l’Est de l’île de Luzon en mer de Chine du Sud. L’accord prévoyait une exploitation conjointe entre les Philippines et la Chine, et fut négociée du côté chinois par le vice-ministre des Affaires étrangères, M. Fu Ying, et du côté philippin par le sénateur Antonio Trillanes. Tous les indices montrent que cet accord a été saboté par les États-Unis par le biais de leur allié local, le ministre philippin des Affaires étrangères, M. Albert del Rosario.

Si la rhétorique occidentale est si ouvertement fausse et ne sert que ses propres intérêts, alors quelles sont les réelles motivations derrière l’activité militaire grandissante des États-Unis et de leurs alliés comme l’Australie en mer de Chine du Sud?

Cette activité militaire inclut le déplacement d’un groupe aéronaval [porte-avion plus navires et sous-marins de protection, NdT] américain dans la zone maritime disputée en mer de Chine du Sud, le survol par un bombardier armé à l’intérieur de la zone des 12 milles nautiques du territoire chinois, et l’utilisation constante de vocabulaire belliqueux de la part d’officiers gradés sur la nécessité de «répondre à l’agression chinoise». De plus, les États-Unis continuent d’augmenter leur réseau déjà impressionnant de bases militaires dans la région, notamment par des accords récents avec l’Australie et les Philippines, en vue d’assurer des rotations de personnel militaire américain sur les bases de ces pays alliés.

Ceci vient s’ajouter à la forte présence militaire américaine à Okinawa, Guam et autres pays de la région, le tout pour contenir la Chine. Les sous-marins nucléaires américains patrouillent aussi en mer de Chine du Sud. Cela démontre le ridicule des analystes occidentaux, qui prétendent que ceci ne représente pas une politique d’encerclement de la Chine.

Une politique similaire fut pratiquée par les États-Unis contre la Russie, avec des intrusions toujours plus audacieuses des espaces aériens et maritimes voisins de la Russie par les forces armées nucléaires américaines.

L’Australie a rejoint les États-Unis et autres alliés américains pour des exercices militaires en Mer de Chine du Sud. Il n’y a aucune menace militaire plausible dirigée contre l’Australie, et malgré cela elle rejoint ce qui est clairement un exercice de provocation envers la Chine.

Aucun analyste des médias de masse en Occident ne pose la question qui s’impose : quelle serait la réaction des États-Unis si la Chine (ou la Russie) établissait des bases militaires ou participait à des exercices militaires à la même distance du territoire continental américain ? La soi-disant crise des missiles de Cuba en octobre 1962 constitue un précédent historique. A cette occasion, le monde est passé à deux doigts d’une guerre nucléaire entre les États-Unis et la Russie. Ce ne sont pas les dirigeants américains actuels qui feraient preuve d’une telle retenue.

La conclusion qui s’impose, à la lumière de la rhétorique américaine et australienne sur la liberté de navigation et la résolution pacifique des différends dans les limites du cadre juridique international, est que ce n’est qu’un écran de fumée destiner à tromper l’opinion.

La composante géopolitique majeure du XXIe siècle est la résurgence de la Chine comme superpuissance régionale. Sa prééminence économique est irréfutable, illustrée par le volume du trafic maritime en mer de Chine du Sud dont nous parlions précédemment.

Cela se reflète aussi dans le plus grand projet d’infrastructure au monde, les Routes de la Soie maritimes et terrestres qui sont chères au Président Xi. Ces projets ont le potentiel de transformer pas seulement la Chine elle-même, mais aussi tous les pays que traverseront ces nouvelles routes de la Soie.
Ces projets d’infrastructures sont un élément de la transformation des relations géopolitiques lancée par la Chine. L’Organisation de coopération de Shanghai, qui sera bientôt rejointe par l’Inde, le Pakistan et peut-être l’Iran, et regroupe quelques 40% de la population mondiale, est un projet très mal compris par les médias occidentaux.

Au niveau de la finance, le changement a lieu sur plusieurs fronts : la création de la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (AIIB, que l’Australie a rejoint, dans ce qui semble être un rare exemple de défiance à l’hégémonie américaine) ; le commerce bilatéral en monnaies nationales au lieu du dollar US ; un système de crédit interbancaire en dehors des systèmes de contrôle occidentaux [le CIPS, pour China Interbank Payment System, est un système de paiement interbancaire en Yuan chinois, pas complètement séparé du système américain SWIFT, NdT] ; le développement de mécanismes d’aide financière aux États, séparé des institutions occidentales contrôlées par le FMI et la Banque mondiale.

La Chine a investi massivement dans des projets de lignes ferroviaires à grande vitesse en Indonésie, dans des barrages, autoroutes et centrales électriques en Afrique, et dans un canal au Nicaragua, alternatif à celui de Panama.

Tout ceci, et nous ne touchons que la surface, menace ce qui a toujours été un monopole américain. Les États-Unis prennent donc très mal l’émergence pacifique de cette nouvelle superpuissance, et utilisent donc toute la gamme d’instruments de déstabilisation dont ils disposent, telles les révolutions de couleur, la révolution des parapluies (à Hong Kong en 2014), les attaques sous fausse bannière du type réseau Gladio, le soutien à des groupes terroristes, et bien sûr le harcèlement militaire, dont les manœuvres navales en mer de Chine du Sud sont une illustration.

La rhétorique belliqueuse de l’amiral américain Harry Harris et du ministre de la Défense Ash Carter sont symptomatiques de la résistance américaine au retour inévitable d’une influence chinoise et de son pouvoir, d’abord bien sûr dans sa sphère d’influence naturelle, mais de plus en plus sur la scène internationale dans son ensemble.

Le danger pour l’Australie est double. D’abord, l’Australie s’est naturellement placée sous le parapluie de la défense américaine depuis la chute de Singapour aux mains des troupes japonaises en 1942. Cette dépendance à ce que l’ancien Premier ministre australien, Malcolm Fraser, appelait «un dangereux allié», a conduit l’Australie à s’aventurer dans de désastreuses campagnes militaires à l’étranger qui n’ont absolument rien à voir avec la défense de ses propres intérêts. Nous parlons bien sûr du Vietnam, de l’Afghanistan, de l’Irak et aujourd’hui de la Syrie.

Ces campagnes militaires à l’étranger, non seulement sortaient du cadre de l’intérêt national australien,  mais étaient également illégales au regard du droit international. Ainsi, dans la foulée, l’Australie a perdu sa légitimité dans les forums internationaux comme les Nations Unies. Un exemple récurrent est le soutien de l’Australie aux politiques d’Israël, en opposition avec l’immense majorité des membres de l’ONU.

Malgré son implication, sur ordre des États-Unis, dans cette autre intervention militaire illégale qu’est le conflit en Syrie, l’Australie a été exclue des pourparlers de paix à Genève, sur demande expresse de la Russie, parce que l’Australie est vue comme rien de plus qu’un laquais des États-Unis, et donc considérée comme inapte à apporter une contribution indépendante au débat. Le peuple australien a été soigneusement maintenu dans l’ignorance de cette humiliation diplomatique par les médias de masse complices des dirigeants australiens, qui ont omis d’en parler.

Plus récemment, les manœuvres navales conjointes entre l’Australie et les États-Unis en mer de Chine du Sud, illustrent un peu plus la déconnexion entre les actions du gouvernement australien et les intérêts de l’Australie, tout cela suite à une simple requête américaine.

Le second danger pour l’Australie est encore plus grand. La prospérité de l’économie australienne des quarante dernières années, repose principalement sur sa propension à creuser des trous dans son sous-sol et à exporter les minéraux qu’elle en extrait vers la Chine : le minerai de fer, le charbon et le gaz naturel sont de loin les exportations les plus importantes de l’Australie vers la Chine, en volume comme en valeur.

Peu de gens en Australie savent que plusieurs des États-membres de l’Organisation de coopération de Shanghai, également placés sur le tracé des Nouvelles routes de la soie, sont eux-mêmes grands producteurs des mêmes minéraux que l’Australie a exportés vers la Chine, garantissant ainsi sa récente prospérité.

Ces pays seront liés à la Chine par des voies ferrées à grande vitesse, et d’autres infrastructures. Ces pays seront considérés par la Chine comme plus amicaux, plus dignes de confiance, et comme des alternatives plus faciles d’accès que l’Australie. C’est également vrai, dans une certaine mesure, des pays africains et de leurs ressources, qui font également partie intégrante des projets d’infrastructure et de développement du Président Xi.

D’immenses contrats ont également été signés entre la Chine et la Russie, qui ont toutes deux un intérêt mutuel à résister aux attaques occidentales sur leur économie et leur développement politique. La Russie est capable à elle seule de remplacer l’Australie comme source de matières premières, et n’est pas particulièrement bien disposée envers cette dernière, à la lumière de sa participation aux côtés des États-Unis en Ukraine et ailleurs. L’imminente accession de l’Iran à l’Organisation de coopération de Shanghai fera encore évoluer le paysage géopolitique dans la même direction.

À choisir entre un approvisionnement en matières premières auprès de membres amis de l’Organisation de coopération de Shanghai et des BRICS, sans parler des pays africains qui ont été la destination de choix pour beaucoup d’investissements chinois récemment, et auprès de l’Australie, dont la politique étrangère est hostile aux intérêts chinois, on devine aisément quel serait le partenaire commercial de choix pour la Chine.

Cette nouvelle réalité a été une révélation pour l’actuel Premier ministre australien Malcolm Turnbull, avant qu’il ne soit élu. Qu’il ait maintenant changé son fusil d’épaule et qu’il reprenne en chœur les chants hégémoniques avec les Américains, illustre probablement en partie le fait qu’il réalise le danger de croiser le fer avec les Américains. Mais cela ne sera certainement pas dans l’intérêt de l’Australie de contribuer au maintien du vieil ordre mondial, alors qu’une nouvelle réalité est en train de prendre forme.

Aussi bien l’Australie que la Chine, ont un intérêt à voir se développer une Asie prospère et stable. Pour que l’Australie bénéficie de cette stabilité et prospérité, elle doit repenser de fond en comble ses priorités géopolitiques. Mais les signaux récents de cette nouvelle appréciation ne sont pas de bon augure.

James O’Neill

James O’Neill, un avocat basé en Australie, écrit exclusivement pour le magazine New Eastern Outlook.

Traduit par Laurent Schiaparelli, vérifié par Wayan, relu par Diane pour Le Saker Francophone