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Auteur Sujet: Le Premier ministre Lula : Le Brésilien qui va changer la donne.  (Lu 1866 fois)

JacquesL

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Rappel : énorme campagne médiatique et judiciaire pour un coup d'état au Brésil, avec destitution de la présidente Dilma Roussef, et mise en prison de Lula.

Le Premier ministre Lula : Le Brésilien qui va changer la donne.

http://lesakerfrancophone.fr/w-le-premier-ministre-lula-le-bresilien-qui-va-changer-la-donne
Par Pepe Escobar.
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Par Pepe Escobar – Le 16 mars 2016 – Russia Today.

Comparée au tourbillon politique et économique au Brésil, la série House of Cards est une série pour enfants.

Après seulement trois jours d’importantes manifestations appelant à la destitution de la présidente Dilma Rousseff et moins de deux semaines après sa détention légalement douteuse de 4 heures dans le but de l’interroger, l’ancien président brésilien Lula s’apprête à réintégrer de manière spectaculaire le gouvernement brésilien en tant que ministre, ou plutôt super-ministre.


Dilma Roussef et Lula

C’est le seul et unique mouvement restant sur l’échiquier politique pour Roussef, dans cette crise politique et économique sans précédent. Comme on pouvait s’y attendre, elle sera accusée par tout le monde – de la bourgeoisie compradore à Wall Street – d’avoir abdiqué en faveur de Lula, pendant que Lula sera accusé de se protéger de l’enquête de corruption intitulée Car Wash, lancée il y a deux ans.

Lula et sa protégée Dilma ont eu deux rencontres quitte ou double en tête à tête à Brasília, mardi soir et vendredi matin, pour discuter en détail des conditions de ce retour. D’abord, Lula n’accepterait un poste au gouvernement que s’il en devient Secrétaire gouvernemental – responsable de l’articulation politique, il ferait ensuite partie du noyau très fermé qui décide réellement de la politique brésilienne.

Mais ensuite, selon un ministre du gouvernement, qui a requis l’anonymat, est apparue la suggestion de nommer Lula Chief of Staff – le plus important poste de ministre au Brésil.

Ce qui est certain, c’est que Lula est déterminé à devenir une sorte de Premier ministre – ce qui implique pour lui d’avoir carte blanche pour changer de manière drastique la politique économique bancale de Dilma et se reconnecter avec force à la grande base sociale du Parti des travailleurs, embourbé dans une profonde détresse à cause des fortes baisses de dépenses sociales. Si Lula s’en tire – et c’est un grand Si –, il sera également parfaitement placé pour les élections présidentielles brésiliennes de 2018, au grand dam du groupe de droite comprenant la vieille élite, les médias et les chefs d’entreprise.

Le prochain rôle de Lula, institutionnellement, sera de coordonner les mesures pour redémarrer la croissance du Brésil, tout en ré-agençant la base du gouvernement au sein du notoirement corrompu Congrès brésilien. Il obtiendra l’immunité contre l’enquête Car Wash – mais il peut toujours être mis en examen par la Cour suprême brésilienne.

Un revenant ?

Le travail de Lula a tout du mythe de Sisyphe. A quel point l’ancien politicien le plus admiré au monde (Obama : «That’s the guy») a conservé son capital politique, est sujet à de sérieux questionnements. Rien que le souffle de la possibilité de le voir Premier ministre, qui planait tôt dans la semaine, a été suffisante pour faire plonger la bourse de São Paulo et faire remonter le dollar américain. Son combat contre la déesse du marché sera digne d’un western classique.

Lula a toujours privilégié des budgets équilibrés et une crédibilité gouvernementale. Par exemple, en accédant au pouvoir en 2003, il plaça l’ancien as de la BankBoston, Henrique Meirelles, à la Banque centrale et effectua directement un réajustement budgétaire, assainissant les dépenses et domptant l’inflation.

Lula n’est pas contre une règlementation fiscale en soi – ce dont le Brésil a gravement besoin ; le problème des propres réglementations de Dilma est que ce sont des règlementations trop dures touchant très sévèrement la classe ouvrière brésilienne et les classes moyennes basses, dont une rafle sur l’assurance chômage. Lula est fondamentalement contre la taxation excessive des classes ouvrières – ce qui fait chuter l’économie encore plus bas. La preuve que ce qu’il fit en 2003 fut la bonne chose – et fit partie d’une longue tactique calculée – est que le Brésil était en croissance de 7,5% par an en 2010.

Bête médiatique aussi efficace que Bill Clinton dans ses jours glorieux, Lula va également passer en offensive non-stop en termes de communication – quelque chose que l’administration Dilma ne maîtrise tout simplement pas. Une fois au pouvoir, il a toujours expliqué sa politique en termes simples, par exemple en incitant les gens à faire leurs courses avec le crédit donné par son administration. Mais c’était le bon vieux temps ; maintenant c’est un environnement malsain de non-consommation, non-investissement et non-crédit.

Cependant, Lula est contraint de ramener Meirelles – un favori de Wall Street – à la Banque centrale. Meirelles a déjà prévenu que des réformes profondément impopulaires seront nécessaires si le Brésil veut regagner sa compétitivité.

Tous les regards convergent vers la Cour suprême

Lula, même s’il va changer la donne, n’est pas près de renverser ce complexe échiquier; il le rendra plutôt encore plus imprévisible. Le système élitiste hégémonique juridico-politique et économico-médiatique hurlait pour la destitution de Rousseff pas plus tard que ce weekend. Pourtant, à l’heure actuelle, personne ne sait à quoi un Brésil post-destitution ressemblerait.

Dans les circonstances présentes, une destitution de Rousseff – qui n’a été formellement accusée d’aucun méfait – serait un coup d’État qui ne dit pas son nom. Une des premières actions du Premier ministre Lula, un maître négociateur, alors qu’il saisit l’échiquier, sera d’offrir une solution négociée à la crise, ce qui implique que cette administration reste, y compris le vice-président Temer, dont le parti politique est le PMDB, actuellement allié avec le Parti des Travailleurs.

Parallèlement, le Procureur général du Brésil a déjà collecté des informations sur le fameux sniffeur de coke ayant perdu les dernières élections présidentielles, le chef de l’opposition de droite Aecio Neves, qui, entre autres exploits, possède un compte en banque illégal au Liechtenstein sous le nom de sa mère.  Il est voué à faire l’objet de sérieuses investigations.

Le procureur général – sur la base de ce que l’ancien chef du Sénat voulant atteindre une poignée de notables a révélé – s’apprête en réalité à enquêter sur des centaines d’individus, de Lula à l’actuel vice-président de Dilma, Temer, à Neves et à l’actuel ministre de l’Éducation.

Dans le même temps, l’affaire Car Wash, un scénario hollywoodien lourdement politisé, continuera de tourner à plein régime même si les objectifs principaux – Rousseff destituée et Lula enchaîné – deviennent plus inatteignables. Leur stratégie-clé est claire ; intimider virtuellement tout le monde. Les procureurs fédéraux derrière Car Wash veulent empêcher toute possibilité d’accord politique à Brasília, même si cela doit plonger le pays dans une guerre civile, aggravée par une crise économique qui va se renforçant.

Il est également clair que si la Cour suprême brésilienne ne contrôle pas les innombrables excès dans l’enquête Car Wash, il n’y a plus de possibilité pour le Brésil de sortir de cette terrible crise politico-économique.

Et tout ceci pendant que la destitution entre en mode Walking Dead. Institutionnellement, une destitution rapide pourrait ne durer que 45 jours. C’est tout le temps que Lula aurait pour restructurer un grand marché en garantissant au parti PMDB la viabilité économique de l’administration Rousseff.

Avant le changement de donne amené par Lula et au sujet de l’offensive contre lui, Dilma et le Parti des Travailleurs, le grand historien Paulo Alves de Lima m’a dit : «Nous sommes au bord d’un nouvel épisode de déferlante contre-révolutionnaire, d’une démocratie encore plus restreinte, insupportablement empreinte d’arrogance et de violence institutionnelle. Nous sommes plus proches de Pinochet, de l’État idéal entériné par le néolibéralisme de Friedman. Nous sommes au bord du fascisme de masse, ce qui est une nouveauté au Brésil.»

Le spectre de Pinochet, de la droite, saisissant le pouvoir comme en 1964 au Brésil et en 1973 au Chili, est peut être partiellement exorcisé – pour l’instant. Mais ne vous y trompez pas : les prochains jours sont destinés à être épiques. Le juge Moro, l’Elliot Ness de Car

Wash, allié à l’empire médiatique Globo, va utiliser tous les moyens pour empêcher toute possibilité d’accord politique à Brasília, en tous cas d’accord négocié par Lula. Parce que cela signifierait un Lula non seulement Premier ministre, mais aussi président – à nouveau – en 2018. La guerre ouverte commence tout juste.

Pepe Escobar

Article original paru sur Russia Today.

Traduit par Ismael, vérifié par Wayan, relu par nadine pour le Saker Francophone.

Note du Saker Francophone

La série sur les Guerres Hybrides est tout à fait d'actualité pour comprendre ce qui se passe au Brésil

Amputer les BRICS de leur B, quel succès éventuel pour l'oligarchie USraélinne !

JacquesL

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La dernière révolution thématique de la CIA : la révolution du canard jaune au Brésil

http://lesakerfrancophone.fr/la-derniere-revolution-thematique-de-langley-la-revolution-du-canard-jaune-au-bresil

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La dernière révolution thématique de la CIA : la révolution du canard jaune au Brésil

Par Wayne Madsen – Le 24 mars 2016 – Source Strategic Culture

La dernière révolution thématique concoctée par l’aile soft power des agents de l’Agence centrale de renseignements (CIA) dans les corps législatifs de la fédération et des états du Brésil, les médias commerciaux, les tribunaux et les bureaux des procureurs – tous stimulés par l’appui financier des organisations non gouvernementales de George Soros – est la Révolution du canard jaune.


De grands canards jaunes gonflables – qui représenteraient le charlatanisme économique de la présidente Dilma Rousseff et de son gouvernement du Parti des travailleurs – sont apparus dans des manifestations de rue financées par les États-Unis à Brasília, Rio de Janeiro et São Paulo. On trouve les principaux coordinateurs de ces manifestations dans les plus grandes fédérations d’entreprises et les plus grands conglomérats de médias commerciaux du Brésil, et tous ont des liens avec des organisations nationales à but non lucratif comme Vem Pra Rua (À la rue) – une appellation typique de Soros – et Free Brazil Movement (Mouvement Brésil libre), financées à leur tour par les suspects habituels, le National Endowment for Democracy – NED [Fondation nationale pour la démocratie], la US Agency for International Development – USAID [Agence étasunienne pour le développement international], et l’Open Society Institute [Institut pour une société ouverte] de Soros.

Après avoir essayé d’organiser la défaite électorale de la présidente progressiste de gauche du Brésil, Dilma Rousseff, par la combinaison de l’assassinat du candidat à la présidentielle (l’assassinat aérien d’Eduardo Campos en 2014 afin d’ouvrir la voie de la présidence à Marina Silva, la candidate verte appartenant à Wall Street, co-listière de Campos pour la vice-présidence), de manifestations de rue rémunérées et d’une propagande des médias commerciaux, les fantômes de Langley tentent maintenant d’obliger Rousseff à quitter son poste au travers d’une procédure de destitution Made in America. Consciente que le prédécesseur progressiste et mentor de Rousseff, Luiz Inacio Lula da Silva, était visé par les procureurs brésiliens payés par la CIA, pour être arrêté et poursuivi pour corruption, elle l’a nommé à un poste ministériel dans son gouvernement, ce qui lui assure l’immunité contre les poursuites pénales. Lula n’est devenu une cible que parce qu’il a mentionné son désir d’être candidat à la présidence après la fin du mandat de Rousseff en 2019.

Le Parti des travailleurs souligne, à juste titre, que les manœuvres de destitution de son mandat contre Rousseff et les opérations judiciaires contre elle et Lula, viennent de Washington. Des opérations de la même eau, menées par la CIA sous couvert de la loi ont été dirigées contre les présidents Cristina Fernandez de Kirchner en Argentine, Rafael Correa en Équateur, Evo Morales en Bolivie, Nicolas Maduro au Venezuela, Fernando Lugo au Paraguay et Manuel Zelaya au Honduras. Dans les cas de Lugo et Zelaya, les opérations ont réussi et les deux dirigeants ont été chassés du pouvoir par les forces de droite soutenues par la CIA.

Depuis leur début en 2014, les manifestations contre Rousseff ont adopté la construction typique des révolutions thématiques de Soros. Comme lors des manifestations du Printemps arabe, inspirées par Soros et alimentées par la CIA, en Égypte, en Libye, en Syrie et en Tunisie, et l’Euro-Maïdan en Ukraine, le mouvement Vem Pra Rua et le Mouvement pour un Brésil libre qui lui est associé, ne sont fondamentalement rien de plus que des campagnes politiques capitalistes reposant sur Facebook, Twitter, ainsi que les chaînes de télévision et de radio, les journaux et les sites internet favorables à l’insurrection.

En plus des canards jaunes gonflables, les manifestations ont été caractérisées par des poupées gonflables rapidement fabriquées de Lula revêtu d’une tenue de prisonnier noire et blanche et par un panneau caricaturant Rousseff barré en diagonale d’un Non rouge. Le matériel des manifestations, qui comprend aussi des drapeaux et des vêtements verts et jaunes, est un signe révélateur des sommes d’argent importantes soutenant la supercherie de cette guerre psychologique.

Les procureurs brésiliens, membres du personnel de Langley, ont arrêté le populaire Lula après avoir organisé une descente policière massive dans sa maison. La police a aussi arrêté l’ancienne première dame du Brésil, l’épouse de Lula, Marisa Leticia. Lula a dit qu’il s’est senti enlevé par la police. En 2009, les troupes honduriennes ont effectivement enlevé le président Manuel Zelaya au milieu de la nuit et l’ont détenu dans une cellule militaire avant de l’expulser du pays. Cette opération, comme celle contre Lula et Rousseff, était soutenue non seulement par la CIA et la NSA, mais par le Centre de commandement des États-Unis pour l’Amérique du Sud à Miami. Le coup d’État hondurien était aussi soutenu par la Cour suprême du Honduras. Pour éviter une nouvelle arrestation de son prédécesseur, Rousseff a nommé Lula chef de cabinet, un poste ministériel qui offre à Lula une certaine protection contre le harcèlement continuel des poursuites et des procédures judiciaires de la Cour fédérale.

Le 16 mars, le juge Sergio Moro, qui est chargé de l’opération Lava-jato (Car wash), l’enquête de deux ans sur Petrobras et les soupçons de corruption impliquant Rousseff et Lula, a divulgué l’enregistrement de deux communications téléphoniques interceptées entre la présidente et l’ancien président. La conversation mise sur écoute portait notamment sur les projets de Rousseff de nommer Lula chef de cabinet, un poste ministériel, comme un moyen de lui garantir une certaine protection contre le coup de force judiciaire soutenu par la CIA actuellement en cours. Rousseff avait été auparavant chef de cabinet de Lula. Des documents classifiés de l’Agence nationale de sécurité divulgués par le lanceur d’alerte Ed Snowden illustrent comment la NSA a espionné le cabinet et les téléphones mobiles de Rousseff. Le président Obama a proclamé qu’il avait ordonné de mettre fin à cet espionnage des dirigeants mondiaux amicaux à l’égard des États-Unis. La déclaration d’Obama était fausse.

Le nom du juge Sergio Moro apparaît dans l’une des dépêches du Département d’État qui ont été divulguées. Le 30 octobre 2009, l’ambassade étasunienne à Brasília a rapporté que Moro assistait à un colloque financé par l’ambassade à Rio de Janeiro, qui s’est tenu du 4 au 9 octobre. Intitulée Illicit Financial Crimes [Délits financiers illicites], le colloque semble avoir été un moyen, pour la CIA et d’autres agences de renseignement étasuniennes, d’entraîner les organes de répression de l’État fédéral du Brésil ainsi que d’autres responsables des polices d’Amérique latine, l’Argentine, le Paraguay, Panama et l’Uruguay, à des méthodes pour monter des poursuites criminelles bidon contre les dirigeants latino-américains considérés comme hostiles aux États-Unis. La dépêche du Département d’État depuis Brasília dit: «Moro […] a analysé les 15 thèmes principaux qu’il voit dans les cas de blanchiment d’argent traités par les tribunaux brésiliens

Un élément qui ne figurait pas sur l’ordre du jour du séminaire de l’ambassade étasunienne était l’espionnage secret par la NSA des communications de Rousseff, Lula et la compagnie pétrolière brésilienne d’État, Petrobras. Recourant à une technique connue sous le nom de construction parallèle des poursuites pénales, des procureurs étasuniens, étant donné leur accès aux communications illégalement interceptées, ont lancé des poursuites contre des citoyens américains, basées sur l’utilisation sélective d’enregistrements réalisés sans mandat. Si de telles tactiques peuvent être utilisées aux États-Unis, elles peuvent certainement l’être contre des dirigeants comme Rousseff, Lula et d’autres. Les enregistrements des conversations téléphoniques entre Rousseff et Lula de l’opération Car wash qui ont été fournies aux médias par le juge Moro, trouvent peut-être leur origine dans la NSA et sa base de données XKEYSCORE d’enregistrement des communications du gouvernement et des entreprises du Brésil, réalisées par des mises sur écoute sous les noms de code de KATEEL, POCOMOKE et SILVERZEPHYR.

Dans ce qu’on pourrait appeler la doctrine Obama, la CIA a changé son plan de jeu pour renverser des gouvernements légitimes en utilisant ostensiblement des moyens légaux. Plutôt que de se reposer sur les généraux et les tanks d’une junte militaire pour imposer sa volonté, la CIA, en lieu et place, a employé des procureurs, des juges, des dirigeants de partis d’opposition, des éditeurs de journaux et des administrateurs de sites internet ainsi que des mobilisations recourant à des artifices publicitaires – des canards jaunes gonflables, des marionnettes en papier mâché et des t-shirts fraîchement sérigraphiés, des drapeaux et des banderoles – comme facilitateurs de la révolution thématique.

Comme le montrent les dépêches du département d’État qui ont fuité, la CIA a identifié un grand nombre d’agents d’influence sur lesquels elle peut compter pour fournir des renseignements sur Rousseff et sur Lula. Ces sources ont inclus des hauts dirigeants du Parti des travailleurs, des responsables de Petrobras impatients de voir leur compagnie vendue aux fonds vautours étrangers les plus offrants, les dirigeants de la Banque centrale brésilienne et les officiers du service de renseignement militaire brésilien qui avaient été entraînés au départ par les services secrets et les agences militaires des États-Unis.

En plus du Brésil, d’autres pays membres des BRICS ont aussi vu les États-Unis accroître leurs efforts pour organiser des révolutions thématiques. L’Afrique du Sud est sur la liste des cibles, comme la Russie et la Chine.

Wayne Madsen

Traduit par Diane, vérifié par Wayan relu par Diane pour le Saker francophone

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Après le vote de destitution de la présidente brésilienne, un haut dirigeant de l’opposition se rend à Washington
https://theintercept.com/2016/04/18/after-vote-to-remove-brazils-president-key-opposition-figure-holds-meetings-in-washington/
http://lesakerfrancophone.fr/apres-le-vote-de-destitution-de-la-presidente-bresilienne-un-haut-dirigeant-de-lopposition-se-rend-a-washington

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Après le vote de destitution de la présidente brésilienne, un haut dirigeant de l’opposition se rend à Washington

«C’est un voyage de relations publiques», dit Maurício Santoro, un professeur de sciences politiques à l'Université d’État de Rio de Janeiro, dans une interview à The Intercept. «Le défi le plus important auquel Aloysio fait face n’est pas le gouvernement américain, c’est l'opinion publique américaine. Voilà où l'opposition est en train de perdre la bataille.»

Par Glenn Greenwald – le 19 avril 2016 – The Intercept.

La Chambre des députés brésilienne a voté dimanche pour destituer le président du pays, Dilma Rousseff, et renvoyé la procédure devant le Sénat. Dans un acte symbolique involontaire mais significatif, le député qui a aidé à ce que la mise en accusation atteigne le seuil de 342 voix est Bruno Araújo, pourtant lui-même mis en cause dans le document, indiquant qu’il pourrait avoir reçu des fonds illégaux du géant de la construction, au cœur du scandale de corruption qui déstabilise le pays.


Plus significatif encore, Araújo appartient au PSDB, le parti de centre-droit dont les candidats ont perdu quatre élections nationales face au PT, le parti de gauche modérée de Rousseff, avec la dernière défaite il y a seulement 18 mois, lorsque 54 millions de Brésiliens ont réélu Dilma comme présidente du pays.

Ces deux faits à propos d’Araújo soulignent la nature particulièrement surréaliste de la procédure d’hier à Brasília, capitale du cinquième plus grand pays au monde. Les politiciens et les partis qui, depuis deux décennies s’évertuent, sans y arriver, à battre le PT aux élections démocratiques, ont triomphalement fait un pas de plus pour renverser le vote de 2014 en destituant Dilma pour des motifs qui sont, comme le New York Times d’aujourd’hui le montre clairement, au mieux extrêmement douteux. Même The Economist, qui a longtemps méprisé le PT et ses programmes de lutte contre la pauvreté, et voudrait voir Dilma démissionner, a fait valoir que «en l’absence de preuve de la criminalité, la mise en accusation est injustifiée» et «ressemble à un prétexte pour évincer un président impopulaire».

La procédure de dimanche, menée au nom de la lutte contre la corruption, a été présidée par l’un des politiciens les plus extrêmement corrompus du monde démocratique, le président de la Chambre, Eduardo Cunha, dont on a récemment découvert qu’il a caché des millions de dollars dans le secret des comptes bancaires suisses, qui n’ont aucune origine possible qui ne soit pas corrompue, et qui a menti sous serment quand il a affirmé aux enquêteurs du Congrès qu’il n’avait aucun compte bancaire à l’étranger. Selon le Globe and Mail, sur les 594 membres du Congrès, «318 sont sous enquête ou sont confrontés à des accusations» alors que leur cible, la présidente Rousseff, «n’est confrontée à aucune allégation d’irrégularité financière

Un par un, tous ces législateurs soupçonnés de corruption, ont défilé au micro pour suivre Cunha, votant «oui» à la destitution, prétendant être horrifiés par la corruption. Comme préambules à leurs votes, ils ont utilisé une gamme étourdissante de motifs bizarres, allant des «fondements du christianisme» et «ne pas être aussi communiste que le Venezuela et la Corée du Nord» à «la nation évangélique» et «la paix de Jérusalem ». Jonathan Watts du Guardian a capté quelques moments de cette farce:

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    Oui, a voté Paulo Maluf, qui est sur la liste rouge d’Interpol pour conspiration. Oui, a voté Nilton Capixaba, qui est accusé de blanchiment d’argent. «Pour l’amour de Dieu, oui!» a déclaré Silas Camara, qui est sous enquête pour falsification de documents et détournement de fonds publics.


Il est fort probable que le Sénat accepte de suivre la procédure, ce qui se traduira par une suspension de 180 jours du poste de présidente de Dilma, et l’intronisation du vice-président Michel Temer, du parti PMDB, un ami des patrons. Le vice-président est lui-même, comme le New York Times le dit, «sous enquête à propos d’une déclaration comme quoi il aurait été impliqué dans un système d’achat illégal d’éthanol». Temer a récemment fait savoir que l’un des principaux candidats à la tête de son équipe économique serait le président de Goldman Sachs Brésil, Paulo Leme.

Si, après débat, les deux tiers du Sénat votent pour la condamner, Dilma sera définitivement écartée du pouvoir. Beaucoup soupçonnent que l’objectif principal de la destitution de Dilma est de faire croire au  public que la corruption a été supprimée, alors qu’en réalité elle permet de mettre Temer aux commandes pour empêcher de nouvelles enquêtes sur les dizaines et les dizaines de politiciens réellement corrompus qui gangrènent les principaux partis.

Les États-Unis ont été particulièrement silencieux sur cette affaire, qui touche le deuxième plus grand pays de cette partie du monde, et son attitude n’a guère été analysée par la presse grand public. Il est facile de comprendre pourquoi. Les États-Unis ont passé des années à nier avec véhémence qu’ils avaient joué un rôle dans le coup d’État militaire de 1964 qui a destitué le gouvernement élu de gauche, coup d’État qui a entraîné 20 ans d’une brutale dictature militaire pro-américaine. Mais des documents secrets et des enregistrements ont émergé, prouvant que les États Unis étaient activement impliqués dans ce coup d’État, et le rapport de la Commission Vérité du Brésil a confirmé que les États-Unis et le Royaume Uni ont agressivement soutenu la dictature et ont même formé des «interrogateurs brésiliens aux techniques de torture».

Le coup d’État et la dictature militaire qui s’en est suivie occupent une place importante dans la controverse actuelle. La présidente Rousseff et ses partisans nomment explicitement la tentative pour la destituer, un coup d’État. Un célèbre député de droite, pro-destitution et qui brigue la présidence, Jair Bolsonaro (dont The Intercept a fait le portrait l’an dernier), a explicitement fait les louanges de la dictature militaire et ostensiblement salué le colonel Carlos Alberto Brilhante Ustra, tortionnaire en chef de la dictature (notamment responsable de la torture de Dilma). Le fils de Bolsonaro, Eduardo, également député, a dit qu’il avait voté pour la destitution «en l’honneur des militaires de 1964», ceux qui ont réalisé le coup d’État et imposé la dictature militaire.

L’invocation sans fin de Dieu et de la famille, par les promoteurs de la mise en accusation de Rousseff, rappelle la devise du coup d’État de 1964 : «La marche de la Famille avec Dieu et pour la liberté». Tout comme les principaux médias oligarchiques du Brésil avaient soutenu le coup d’État de 1964 en disant que c’était un coup nécessaire contre la corruption de gauche, ils ont été unifiés dans leur provocation et leur soutien au mouvement de mise en accusation actuel contre le PT en utilisant les mêmes raisonnements.

Cela faisait des années que la relation entre Dilma et les États-Unis était tendue, et elle a été considérablement aggravée par les révélations d’espionnage de la NSA ciblant l’industrie brésilienne, sa population, et même son président ; et par les liens commerciaux étroits entre le Brésil et la Chine. Son prédécesseur, Luiz Inácio Lula da Silva, s’est également aliéné de nombreux responsables américains, entre autres en se joignant à la Turquie pour négocier un accord indépendant avec l’Iran sur son programme nucléaire, alors que Washington tentait de monter une coalition mondiale contre Téhéran. Washington a clairement fait savoir qu’il ne considérait plus le Brésil comme sûr pour les investissements.

Les États-Unis manigancent depuis longtemps des déstabilisations et des coups d’État contre des gouvernements latino américains de gauche démocratiquement élus qui leur déplaisent. En plus du coup d’État de 1964 au Brésil, les États-Unis ont aidé la tentative de renversement du président vénézuélien Hugo Chávez de 2002, ont joué un rôle central dans l’éviction de 2004 du président haïtien Jean-Bertrand Aristide, puis la secrétaire d’État Hillary Clinton a prêté un soutien capital pour légitimer le coup d’état de 2009 au Honduras, pour ne citer que ces quelques exemples. Nombreux sont ceux dans la gauche brésilienne qui pensent que les États-Unis sont activement derrière l’instabilité actuelle dans leur pays, afin de se débarrasser d’un parti de gauche qui a beaucoup compté sur le commerce avec la Chine, et poussent à l’avènement d’un gouvernement pro-américain qui ne pourrait jamais gagner une élection démocratique par lui-même.

Bien qu’aucune preuve formelle ne soit apparue pour prouver cette théorie, le peu médiatisé voyage aux États-Unis, cette semaine, d’un des principaux leaders de l’opposition brésilienne va probablement alimenter ces suppositions. Aujourd’hui – le lendemain du vote de destitution – le sénateur Aloysio Nunes du PSDB sera à Washington pour entreprendre trois jours de réunions avec divers responsables américains, ainsi qu’avec des lobbyistes proches de Clinton et d’autres personnalités politiques de premier plan.

Nunes va rencontrer le président du Comité sénatorial des relations étrangères, Bob Corker, le sous-secrétaire d’État et ancien ambassadeur au Brésil Thomas Shannon, et assister à un déjeuner le mardi, organisé par le cabinet de lobbying de Washington, Albright Stonebridge Group, dirigé par l’ancienne secrétaire d’État de Bill Clinton, Madeleine Albright, puis rencontrera Carlos Gutierrez, l’ancien ministre du Commerce de Bush et PDG de la société Kellogg Company.

L’ambassade du Brésil à Washington et le bureau de Nunes ont déclaré à The Intercept qu’ils n’avaient pas d’autres informations sur le déjeuner de mardi. Dans un courriel, l’Albright Stonebridge Group a écrit qu’il n’y avait «pas de composante médias» à l’événement, que c’était une affaire réservée à la «communauté politique et au monde des affaires de Washington», et que la liste des participants et des sujets traités ne serait pas rendue publique.

Nunes est une figure extrêmement importante – et révélatrice – de l’opposition à envoyer aux États-Unis pour ces réunions de haut niveau. Il a concouru pour le poste de vice-président en 2014 sous l’étiquette  PSDB, qui a perdu face à Dilma. Il sera, notamment, l’une des figures clés de l’opposition menant la lutte pour attaquer Dilma au Sénat.

En tant que président du Comité des relations étrangères du Sénat brésilien, Nunes a maintes fois préconisé que le Brésil se rapproche d’une alliance avec les États-Unis et le Royaume Uni. Et – cela va sans dire – Nunes a été fortement impliqué dans des allégations de corruption. En septembre, un juge a ordonné une enquête criminelle après qu’un informateur, un dirigeant d’entreprise de construction, a révélé aux enquêteurs qu’il avait donné au sénateur Nunes 500 000 reals (140.000 $) pour sa campagne, 300 000 reals officiellement et 200 000 en pots de vin, dans le but de gagner des contrats avec Petrobras. Ce n’est pas la première accusation de ce genre contre lui.

Le voyage de Nunes à Washington aurait été ordonné par Temer lui-même, qui agit déjà comme s’il dirigeait le Brésil. Temer est furieux par ce qu’il perçoit comme un changement radical, très défavorable, dans le récit médiatique qui, de plus en plus, présente cette destitution comme une tentative anarchique et anti-démocratique de l’opposition, dirigée par Temer lui-même, pour prendre le pouvoir de manière frauduleuse.

Le futur président a ordonné à Nunes de se rendre à Washington, a rapporté Folha, pour lancer «une contre-offensive de relations publiques», afin de lutter contre ce sentiment croissant de coup d’État qui grimpe dans le monde entier, et qui, selon Temer «démoralise les institutions». S’inquiétant de ces perceptions croissantes de coup d’État contre Dilma, Nunes a déclaré à Washington que «nous allons expliquer que nous ne sommes pas une république bananière». Un représentant de Temer a déclaré que cette perception du public «contamine l’image du Brésil sur la scène internationale».

«C’est un voyage de relations publiques», dit Maurício Santoro, un professeur de sciences politiques à l’Université d’État de Rio de Janeiro, dans une interview à The Intercept. «Le défi le plus important auquel Aloysio fait face n’est pas le gouvernement américain, c’est l’opinion publique américaine. Voilà où l’opposition est en train de perdre la bataille

Il ne fait aucun doute que l’opinion internationale est contre le mouvement de mise en accusation déployé par les partis de l’opposition brésiliens. Alors qu’il y a seulement un mois les médias occidentaux dépeignaient les manifestations anti-gouvernementales de la rue en termes élogieux, ils soulignent maintenant régulièrement le fait que les motifs juridiques de la mise en accusation sont douteux et que les meneurs de cette destitution sont beaucoup plus impliqués dans la corruption que ne l’est Dilma.

En particulier, Temer aurait été préoccupé, et furieux, par la dénonciation de la mise en accusation de Dilma par l’Organisation des États américains, organisation soutenue par les États-Unis, dont le secrétaire général, Luis Almagro, a déclaré que le groupe était «préoccupé par le processus contre Dilma, qui n’a pas été accusée de quoi que ce soit» et parce que «ceux qui poussent à la mise en accusation sont des membres du Congrès accusés et coupables de corruption». Le chef de l’Union des nations sud-américaines, Ernesto Samper, a dit aussi que la mise en accusation «est une raison sérieuse pour être concerné pour la sécurité du Brésil et de la région».

Le voyage à Washington de ce leader d’opposition impliqué dans la corruption, le lendemain du vote pour attaquer Dilma, va soulever des questions sur la position des États-Unis envers la destitution du président. Cela va presque certainement alimenter les inquiétudes de la gauche brésilienne sur le rôle des États-Unis dans l’instabilité de leur pays. Et cela met en évidence des dynamiques cachées derrière la mise en accusation, y compris le désir de rapprocher le Brésil des États-Unis et de le rendre plus accueillant pour les intérêts commerciaux mondiaux et envers les mesures d’austérité au détriment de l’agenda politique que les électeurs brésiliens ont adopté au cours des quatre élections nationales précédentes.

MISE À JOUR: Avant la publication, le bureau du sénateur Nunes a fait savoir à The Intercept qu’il n’y avait pas d’autres informations sur son voyage, au-delà de ce qui a été écrit dans leur communiqué de presse du 15 avril. À la suite de la publication, le bureau du sénateur Nunes nous montra sa lettre du 17 avril à l’éditeur de Folha, affirmant que, contrairement à ce que dit leur article, il ne s’est pas rendu à Washington sous les ordres du vice président Temer.

Glenn Greenwald

Traduit par Wayan, relu par Diane pour le Saker Francophone.